L’animation : un mot devenu banal et qui pourtant charrie l’idée de « donner la vie, le souffle vital, l’esprit » à quelque chose d’inerte. L’animation procède comme par magie. Si l’on sillonne les festivals internationaux chaque année, il n’en reste pas moins que le festival d’Annecy reste l’une de nos étapes les plus appréciées, à raison d’une programmation agressive et d’un cadre propice à toutes les rencontres, quel que soit le statut des uns et des autres. À Annecy, on échange, les studios indépendants et les grandes maisons comme Disney, Dreamwork et Sony se regardent et se rencontrent à la plage du MIFA chaque soir. Le cinéma d’animation est une œuvre collective comme nulle autre. Cette année encore, le festival d’Annecy donnait à voir une programmation éclectique et ô combien vivante. On vous partage notre regard sur le festival avec Kévin Giraud, journaliste du média papier belge Surimpressions. La cérémonie de clôture était également ancrée dans l’horreur du réel et c’est aux Iranien.nes que le message de soutien était adressé lors de la cérémonie de clôture. On conclura cette après-séance par 15 films qui nous ont marqué à Annecy ; le palmarès est accessible en fin de page.
Carnet de bord
Podcast MaG & Surimpressions
Fenêtre sur le Moyen-Orient depuis Annecy : la loi du marteau et de l’enclume
On ne dit jamais assez combien les festivals sont des bulles protégées de la misère intellectuelle, ce fléau qui empoisonne le débat public, aujourd’hui verrouillé par l’extrême droite et la montée du fascisme partout dans le monde. Le flagrant « deux poids deux mesures » d’un ordre international à l’agonie signe la faillite de l’Occident, aveugle au génocide à Gaza, dont il se rend collectivement complice.
Avec son film La Zone d’intérêt (lire notre critique et notre bilan de l’année sur l’urgence de poser les termes), Jonathan Glazer nous rappelait pourtant que le terme devenu tabou ne devrait jamais être « un moment calcifié de l’histoire ». Avec un discours de soutien affiché aux populations perses et arabes brisées, la cérémonie de clôture a, elle aussi, été rattrapée par l’énième embrasement du Moyen-Orient à la suite de l’attaque éclair d’Israël contre son ennemi historique, l’Iran. Ses capacités de dissuasion militaire ont été sérieusement mises à mal, qu’importent les centaines de morts civils infligées par Tsahal pour éliminer les gardiens de Révolution un à un, au mépris affiché des règles élémentaires d’un Droit international conspué. Ou comment éteindre un incendie avec du napalm. Une escalade tristement prévisible annoncée par les innombrables provocations d’officiels de l’Etat occupant les territoires palestiniens depuis la Nakba : l’image de l’ambassadeur d’Israël passant à la broyeuse la Charte de l’ONU après un vote symbolique sur l’adhésion de la Palestine préfigurait, un an plus tôt, les crimes à venir que refusent de reconnaître les pays du Nord. Alors on s’accroche à des prises de positions publiques courageuses comme ici dans les salles obscures d’Annecy.
La réalisatrice iranienne Sepideh Farsi (voir notre interview), membre du jury long-métrage, a dû quitter précipitamment Annecy, laissant un message d’espoir adressé aux festivaliers et artistes venus célébrer le cinéma d’animation. La salle entière s’est levée pour applaudir le message d’une artiste opiniâtre. De Gaza à l’Iran, les populations civiles sont otages de l’impérialisme vengeur de dirigeants qui ne cherchent qu’à fuir leurs propres responsabilités pour mieux renforcer leur pouvoir. La fuite en avant de Netanyahou depuis le 7 octobre en est l’illustration la plus cynique, la population étant désormais largement acquise aux guerres menées contre tous les pays voisins à en croire les sondages publiés, au grand dam des otages encore détenus par le Hamas.
Le jury a également rendu hommage à Parnia Abbasi, poétesse iranienne morte sous les bombes israéliennes avec toute sa famille comme l’exige le protocole israélien déjà employé contre Fatma Hassouna et tant d’autres anonymes. Nombre d’Iraniens rencontrés durant le festival ne savaient pas encore s’ils pourraient rentrer dans leur pays. Certaines réalisatrices allaient engager un long voyage en bus depuis la Turquie pour rejoindre leurs proches avant le black-out d’internet qui nous laisse ces derniers jours sans nouvelles. Dénominateur commun des voix iraniennes avec qui nous avons échangé : la dignité avec laquelle elles s’apprêtaient à rejoindre les leurs, pris en étau entre le marteau du régime iranien et l’enclume de Tsahal.
Si l’Art est un acte de résistance, la course à la « loi du plus fort » initiée par des tyrans comme Trump, Netanyahou et Poutine rend d’autant plus essentielle la nécessité de produire des œuvres qui s’opposent à la flambée des nationalismes. Les intégrismes de tous bords menacent l’équilibre déjà précaire du monde né des cendres de la Seconde guerre mondiale. N’ayons pas peur de prendre la parole ; la solidarité internationale est le seul horizon possible. Il reste des espaces de résistance ; saisissons-les. Depuis les théocraties iraniennes et israéliennes ennemies, de Sepideh Farsi à Nadav lapid, la création contemporaine témoigne de sa capacité de résistance face aux discours univoques. Les morts ont des noms ; ces quelques lignes (aussi vaines soient-elles) leur rendent hommage. Les vers de Parnia Abbasi et son poème L’étoile éteinte résonnaient dans l’enceinte de Bonlieu et font écho aujourd’hui ; puissent-ils un jour contribuer à restaurer la croyance en la justice internationale. Il n’y a pas de « guerre juste », seulement des morts par légions au bénéfice d’autocrates. La guerre est un gouffre duquel ne sort aucun vainqueur. C’est la faillite de notre humanité commune qui constitue une menace existentielle pour l’avenir. Combien d’autres voix s’éteindront encore dans l’indifférence ?
L'étoile éteinte
J’ai pleuré pour nous deux
pour toi,
et pour moi.
Tu souffles mes larmes,
étoiles effacées,
dans le vent de ton ciel.
Dans ton monde,
la lumière se fait délivrance.
Dans le mien,
ce n’est que le théâtre des ombres.
Quelque part,
toi et moi
nous achevons notre histoire.
Le plus beau poème du monde
s’éteint dans le silence.
Quelque part,
tu prends naissance.
Tu cries
le murmure de la vie.
Et moi,
en mille lieux,
je me défais.
Je me consume
deviens une étoile éteinte,
fumée perdue
dans ton ciel.
15 films à voir au festival d'Annecy
Into the Mortal World
Chine| Date de sortie : NC | Réalisation : Zhong Ding | Compétition officielle
Un jeune prétendant parmi les Dieux, Jing Feng, descend dans le monde des mortels pour rechercher la vérité et révéler le complot qui a exclu sa mère des cieux. Sur sa route, il croise le chemin d’une jeune fille mortelle malicieuse et qui cherche à faire le parcours inverse pour retrouver sa mère. Avec Into the Mortal World, l’animation chinoise trouve un nouveau candidat de choix pour décliner le folklore de l’Empire du Milieu dans un film explosif. Aucun temps mort au rendez-vous ; au contraire les images défilent à toute allure, quitte à dérouter ceux qui ne sont pas habitués à la cadence folle des studios chinois. Un film résolument drôle et touchant où l’on retrouve, certes, un cahier des charges collant au plus près du folklore de l’Empire céleste, mais avec une exécution remarquable. On s’incline face à la capacité à surprendre le spectateur par la puissance des émotions et la résolution totale à réaliser un drame dans tous les sens du terme. Disney a du souci à se faire !
Verdict : 🔥🔥🔥🔥
The Girl who stole Time
Chine | Date de sortie : NC | Réalisation : Zhou Tienan, Yu Ao | Compétition officielle
Autre film chinois remarqué, The Girl who stole Time ne manque pas de panache. Sans doute le plus complexe des deux films en termes de scénario comme de mise en scène, ce long-métrage, présenté lui aussi en compétition, raconte l’histoire d’une jeune fille modeste issue d’un modeste village de pêcheurs. Après un naufrage, Qian Xiao trouve par inadvertance le « Cadran du Temps » qui d’être traquée sans relâche par une organisation criminelle digne de la Team Rocket. La jeune fille fait alors équipe avec Seventeen, un homme de main stoïque, prêt à tout pour récupérer le pouvoir du cadran. Se jouant des codes, le film n’hésite pas à multiplier les références au cours d’une aventure qui fleure les films des années 80 entre action, romance et humour. Efficace, même si peut-être un peu déroutant dans son dénouement, The Girl who stole Time est un film flamboyant et diablement expressif. Une pépite d’animation !
Verdict : 🔥🔥🔥🔥
Arco
France | Date de sortie : 22/10/2025| Réalisation : Ugo Bienvenu | Compétition officielle | Interview à venir
Deux ans plus tôt à Annecy, Jérémie Périn présentait Mars Express, film de SF cynique et pas très engageant sur l’avenir de l’humanité. Cette année, le festival opte pour une lueur d’espoir avec Arco, également présenté en compétition au festival de Cannes. Le film d’Ugo Bienvenu raconte l’histoire d’un petit enfant tombé du ciel et précipité dans le passé. En confrontant deux visions de l’avenir, la première tournée vers la technologie au service de l’homme, la seconde recentrée sur l’osmose avec l’environnement, Ugo Bienvenu signe une œuvre moins pessimiste que nombre de productions contemporaines. Le grand effondrement n’est pas celui qu’on croit et Arco vient nous rappeler que les arcs en ciel n’apparaissent paradoxalement qu’après la pluie. Bien écrits, les personnages sont interprétés par un panel d’acteurs qui donnent vie au récit. Un film pour petits et grands qui rafle de peu le cristal du long-métrage à la barbe d’Amélie et la métaphysique des tubes.
Verdict : 🔥🔥🔥🔥
All you need is kill
Japon | Date de sortie : NC | Réalisation : Kenichiro Akimoto | Midnight special
Attention, coup de cœur pour les amoureux du jeu vidéo… A la croisée de l’inégalable Returnal et de la comédie Un jour sans fin, All you need is kill reprend le concept de répétition d’une seule et même journée en boucle. Qu’importe le poids de la mort, chaque jour notre héroïne finit hachée menue par des hordes d’insectoïdes extraterrestres que ne renierait pas Starship Troopers. A chaque fois que cette jeune fille taciturne trépasse, elle se réveiller au même endroit, dans son lit avec le traditionnel réveil que Phil Connors détruisait dans la comédie culte d’Harold Ramis. Le hic, à chaque mort, il faut repartir de 0 pour tenter de survivre face à un ennemi surpuissant. Et s’il fallait se résoudre à attaquer l’ennemi ? On sent combien Kenichiro Akimato et ses équipes ont grandi avec le jeu-vidéo. Qui n’a jamais essayé sans relâche de battre un boss surpuissant de Sekiro jusqu’à arracher la victoire in extremis ? Métaphore de la persévérance aveugle, All you need is kill décline le concept de boucle jusqu’à l’épuisement. C’est brutal, percutant, drôle et particulièrement réussi en termes de direction artistique. Le style très tranché des personnages rappelle la bd et l’animation virevoltante offre de très belles séquences d’action. Un film original qui pèche seulement par un climax un peu trop convenu par rapport à sa proposition de départ.
Verdict : 🔥🔥🔥
Another World
Hong Kong | Date de sortie : NC | Réalisation : Tommy Kai Chung NG | Midnight special
Après la mort, juste avant la réincarnation, les âmes des défunts passent par le royaume fantastique de l’Autre Monde. Gudo, un esprit passeur aide les âmes transitoires à se réincarner. Gudo va se lancer dans une mission périlleuse pour aider Yuri, une princesse dont le père a été assassiné. Another World reprend des thèmes bien connus des animes, notamment sur la rage incontrôlée qui transforme l’hôte en fléau. Film né à Hong-Kong, Another World adopte un style graphique crayonné de toute beauté et qui n’hésite pas à montrer l’horreur. Déroutant au début, l’intrigue finit par se révéler au cours d’un récit millénaire qui porte en creux la violence indissociable de l’histoire de l’humanité. Adapté du manga Sen nen ki de Saijo Naka, Another World souffre peut-être de la complexité de son histoire, dont les déterminants sont difficiles à intégrer dans le format du long-métrage. Même si le film manque d’émotions, il n’en reste pas moins une œuvre crépusculaire intriguante.
Verdict : 🔥🔥🔥
Amélie et la métaphysique des tubes
France | Date de sortie : 25/06/2025 | Réalisation : Maïlys Vallade et Liane-cho han |Compétition officielle
Adaptation du livre éponyme d”Amélie Nothomb, Amélie et la métaphysique des tubes talonnait certainement Arco pour décrocher le Crystal d’argent. Avec sa direction artistique aux teintes pastel et ces grands yeux qui traversent le spectateur, impossible de rester insensible au charme d’un « film guimauve » par excellence. D’une inventivité remarquable, le film de Maïlys Vallade et Liane-Cho Han est un bijou d’écriture. Jusqu’à l’âge de deux ans, Amélie est assimilée à un tube digestif, un légume sans regard, donc « sans vie » rappelle la petite narratrice qui se croît omnisciente. Tout le sel du film vient du fait que l’histoire est racontée depuis la perspective de l’enfant, se considérant alors comme le centre du monde. En grandissant, « Amé » de son nom japonais qui signifie « la pluie » voit son univers s’effondrer. Le Japon qu’elle aime tant est traversé par les stigmates de la guerre. Son enfance japonaise n’est-elle qu’une parenthèse ? « A l’âge-là, on remarque tout mais on ne comprend rien » lâche la jeune Amélie. Une phrase qui symbolise à elle seule toute la beauté de l’enfance qui n’est rien d’autre qu’un passage permanent d’un traumatisme à un autre par l’apprentissage du monde. Un bonbon de l’animation française pour petits et grands à soutenir en salle dès le 25 juin.
Verdict : 🔥🔥🔥🔥🔥
L'œuf de l'ange
Japon | Date de sortie : 1985 (prochainement au cinéma)| Réalisation : Mamoru Oshii | Annecy classics
Mamoru Oshii… un nom qui pour beaucoup évoque l’essence lugubre des années 90’. Dix ans avant son chef d’œuvre Ghost in the Shell, L’œuf de l’ange marquait l’année 1985. Un film mystérieux, avant-gardiste ; soporifique diront ses détracteurs. Marqué par une lenteur caractéristique de la mise en scène de cet anime pas comme les autres, ce moyen métrage évoque un poème sur la fin des temps. Plonger dans cette œuvre, c’est abandonner toute espérance, l’humanité s’est consommée, quelques soldats épars se battent contre des ombres de baleines. Et au milieu, une petite fille quasi mutique rencontre un homme pas plus bavard qui lui confie un œuf. Volontairement cryptique, la narration désarçonnera sans doute ceux qui sont habitués aux explications de texte, de même que les amateurs d’animation épileptique. On est ici aux antipodes des nouveaux standards chinois. L’œuf de l’ange symbolise une époque suspendue à l’aube du XXIe siècle, à l’instar de Blade Runner. Pour peu qu’on adhère aux propositions minimalistes, L’œuf de l’ange convainc par la force de son univers désolé, signe d’une civilisation éteinte où les traces de la vie humaine sont comme pétrifiées, fossilisées même. Fort de son architecture « gigerienne », un couloir est un dédale, à l’image de l’état dans lequel se trouvent les personnages. Sont-ils au purgatoire ? Sont-ils vraiment de nature humaine ? A moins qu’il ne s’agisse d’un songe comme celui du Poisson-rêve qui enfanta l’île Cocolint en 1993 dans The Legend of Zelda: Link’s Awakening. Les mythes bibliques sont détournés, l’espérance, elle, ne fait plus partie du registre de ce monde résiduel. Un film symbolique rare dans le paysage de l’animation japonaise. A (re)découvrir en salle prochainement au cinéma.
Verdict : 🔥🔥🔥🔥🔥
La mort n'existe pas
Canada | Date de sortie : 01/10/2025 | Réalisation : Félix Dufour-Laperrière | Compétition Contrechamp | Interview à venir
Présenté dans la section Contrechamp, La mort n’existe pas interroge frontalement la question de l’action directe. En partant d’un point de départ constitutif de l’engagement politique de jeunes activités, Félix Dufour-Laperrière embarque le spectateur avec cette bande armée prête à commettre l’irrémédiable. Loin de condamner le recours à la violence dirigée contre des nantis devenus parasites de la société qu’ils vampirisent, le réalisateur canadien préfère mettre en lumière les bouleversements internes d’Hélène, hantée par ses complices alors qu’elle les abandonne au moment du passage à l’acte. Conçu comme une révolution au sens littéral du terme, le film imprime un retour introspectif sur soi-même, sur les luttes à mener quoiqu’il en coûte. Porté par une direction artistique originale, les personnages sont tons sur tons comme en surimpression sur un environnement, dont on aperçoit les coups de pinceaux en toile de fond, comme si le monde restait, lui, intangible face à l’activisme. Le passage d’une couleur primaire à une autre rappelle la radicalité à l’œuvre. Un film très littéraire dans l’approche avec des répliques et monologues qui percutent. La mort n’existe pas offre des réflexions engagées sur le passage du conditionnel « Je voudrais » à l’indicatif « je veux ». Un changement de mode aujourd’hui difficile et signe de l’impasse contemporaine pour transformer effectivement le réel.
Verdict : 🔥🔥🔥🔥
Allah n'est pas obligé
France | Date de sortie : 2026 | Réalisation : Zaven Najjar | Compétition officielle | Interview à venir
Allah n’est pas obligé est l’adaptation du roman éponyme d’Ahmadou Kourouma publié il y a 25 ans aux éditions du Seuil et ayant reçu le prix Renaudot la même année. Près d’un quart de siècle plus tard, alors que le sujet des enfants soldats semblent moins occuper les chefferies occidentales comme l’opinion publique, Zaven Najjar remet sur le devant de la scène le sort de ces jeunes enfants pris en étau entre les gangs des guerres civiles qui sévissaient dans l’Afrique de l’Ouest des années 80/90’. De la Guinée, au Sierra Leone, au Liberia et à la Côte d’Ivoire, le jeune Birahima va devoir survivre, glissant irrémédiablement vers les armes. On retrouve le style si singulier de Zaven Najjar qui signait la direction artistique de La Sirène de Sepideh Farsi, réalisatrice iranienne avec qui nous échangions sur la guerre Iran-Irak en 2023 (et dont le très attendu Put your soul on your hand and walk avait ébranlé le festival de Cannes). Comme pour son précèdent film, on retrouve une démarche à la croisée du documentaire et de la fiction, Zaven ayant recueilli nombre de témoignages de locaux qu’il a d’ailleurs impliqué sur la partie musicale du film. Également porté par un humour propre au caractère bien trempé de Birahima accompagné de son oncle marabout pas très conventionnel, Allah n’est pas obligé rappelle que « l’enfant soldat est le personnage le plus célèbre de la fin du XXe siècle ».
Verdict : 🔥🔥🔥🔥
Jinsei
Japon | Date de sortie : NC | Réalisation : Ryuya Suzuki | Compétition Contrechamp
Jinsei, c’est un peu la rencontre entre Ubu et le Japon. Film réalisé par Ryuya Suzuki, Jinsei est une leçon d’absurde. De la naissance à la mort, chacun vit avec nombre de surnoms, parfois pas toujours joyeux. Jinsei est la fresque de la vie d’un jeune homme qui finit, porté par les évènements, à la tête d’un curieux boys band. Jinsei traverse les angoisses de la société japonaise. Construit en dix actes pour une vie, cet anti-héros, taciturne et animé par le néant, voit sa vie défiler avec un humour noir affirmé. Réalisé en un an et demi à peine, Jinsei est une prouesse pour un premier long-métrage, certes un brin décousu, mais qui se distinguait du reste de la sélection par l’élan absurde de sa proposition délurée.
Verdict : 🔥🔥🔥
Housenka
Japon | Date de sortie : NC | Réalisation : Baku Kinoshita | Compétition officielle
Présenté dans la section Work in progress l’an dernier, Housenka est le premier long métrage de Baku Kinoshiata. Obsédé par les histoires de crimes et de yakuzas, le réalisateur japonais tenait à produire un film dédié à cet univers singulier qui traverse l’histoire japonaise. Contrairement à d’autres films dédiés à la mafia, Housenka prend à contre-pieds nos attentes. On suit ici les souvenirs d’un renégat, ancien yakuza condamné à perpétuité et sur ses derniers jours. Le vieillard Akutsu n’en a plus pour longtemps. Depuis sa cellule, il ressasse à une fleur d’housenka sa vie avec Nana et son fils Kensuke, qu’il a toujours voulu écarter de ce milieu vérolé. Le récit alterne entre séquences derrière les barreaux et moments d’intimité de cette petite famille, où le non-dit et l’ombre des gangs plane en permanence. Porté par une bonne idée de départ, notamment avec les échanges avec cette fleur bavarde, le film manque un peu de folie dans son dénouement. Il n’en reste pas moins une proposition originale et agréable à suivre qui nous fait espérer une sortie en salle pour ce premier film prometteur.
Verdict : 🔥🔥🔥
Csongor és Tünde
Hongrie | Date de sortie : NC | Réalisation : Máli Csaba, Pálfi Zsolt | Annecy présente
Si cette 48e édition du festival d’Annecy battait pavillon hongrois avec nombre de courts-métrages originaux, ce n’est pas Csongor és Tünde qui nous a convaincu. Adaptation d’une pièce de théâtre hongroise de Mihály Vörösmarty de 1830, le film de Máli Csaba et Pálfi Zsolt n’arrive jamais à s’affranchir de son époque. On y suit un jeune prince qui se décide à entreprendre un voyage à la recherche du bonheur, lequel est associé à Tünde, la supposée femme de sa vie qu’il a vue en songe. Bien trop classique dans sa construction, ce conte sans âme se refuse à la modernité ; pis encore, certaines scènes sont particulièrement gênantes, à commencer par les attitudes cringe de certains personnages masculins pour le moins problématiques. Leurs comportements sont présentés comme des gags alors qu’il s’agit d’agressions sexuelles, le tout sans aucun recul critique. Quant à la posture de la princesse, elle est par nature amoureuse d’un prince mono-centré qui n’a aucune qualité à faire valoir, si ce n’est son titre royal : autant dire qu’on tombe dans tous les travers et représentations éculées du sexisme. Sa direction artistique nous a également laissé de marbre. Le côté rondouillard et délavé des personnages ne plaira pas à tout le monde, les modèles étant le plus souvent laids. Si l’on comprend la démarche de patrimoine à l’œuvre, il aurait certainement fallu faire preuve de davantage de profondeur pour moderniser la pièce en question. Reste un film pour les petits… mais avec des représentations douteuses et un humour qui rate quasiment systématiquement son coup. Preuve en est, la salle est restée bien silencieuse pendant la séance. À éviter.
Verdict : 🔥
ChaO
Japon | Date de sortie : NC | Réalisation : Yasuhiro Aoki | Compétition officielle
Dans un monde où humains et sirènes coexistent, Stephan, un employé de bureau ordinaire fait la rencontre de Chao, une princesse du royaume des sirènes. ChaO, c’est l’histoire d’une improbable histoire d’amour entre deux êtres que tout oppose. Avec son ton léger, le film ne fait qu’effleurer les thèmes qu’il évoque avec humour. Si certains gags font mouche, on regrettera que le soin apporté aux motivations des personnages n’ait pas été poussé plus loin. Il y avait pourtant matière à amorcer avec plus de finesse cette histoire d’amour catapultée sans qu’on n’y croie vraiment ; cela prive partiellement le spectateur d’adhésion aux émotions. Outre ces choix d’écriture regrettable, la direction artistique est… étrange. On y côtoie des personnages cartonesques avec des modèles réalistes. Contrairement à d’autres films décalés comme La otra forma, film colombien radical, présenté à Annecy en 2022, et où les citoyens mettent leur tête dans des presse pour avoir des têtes rectangulaires, ChaO ne justifie pas clairement ses différences de tons. Pour autant, il faut croire qu’il avait des qualités sincères pour convaincre le jury qui a choisi de le récompenser. Une victoire pour les Japonais, la dernière distinction anniçoise datant d’il y a huit ans avec le sacre de Dans un recoin de ce monde !
Verdict : 🔥🔥
Planètes
Japon / France | Date de sortie : 11/003/2026 | Réalisation : Momoko Seto | Compétition officielle | Interview à venir
Planètes clôturait en beauté la semaine de la critique à Cannes. Naturellement, on s’attendait à voir le film de Momoko Seto figurer dans la sélection officielle. La réalisatrice du CNRS réussit à produire un film à la croisée des genres. Les enfants des années 90’ qui ont grandi avec Microcosmos, lui aussi présenté à Cannes en 1996, reconnaîtront cette fascination pour toutes les formes du vivant. Si l’on aime lever les yeux vers les étoiles, l’homme moderne oublie trop souvent de regarder ce qui est pourtant à ses pieds. C’est cette démarche à la fois macro et micro que conjugue la réalisatrice franco-japonaise dans ce film d’animation à la croisée du réel et de la fiction. D’un point de départ funeste, la destruction nucléaire de la Terre, des akènes de pissenlit prennent le large ; certains parviennent à quitter l’atmosphère et commence alors une épopée pour coloniser d’autres astres. Ces akènes ont leur propre langage. Ensemble ils communient avec la nature et cherchent sans relâche où trouver refuge. Métaphore des réfugiés et du sens de la vie où l’humanité n’est qu’une goutte d’eau dans l’histoire du monde, Planètes est une invitation à considérer le vivant autrement que par le prisme de l’Homme. Le timelapse fait respirer la terre qui se contracte à l’écran lorsqu’une jeune pousse pionnière émerge du sol. Un film au style hors norme qui rappelle que « la vie trouve toujours son chemin », comme dirait ce bon vieux Ian Malcolm.
Verdict : 🔥🔥🔥🔥
Predator : Killer of Killers
USA | Date de sortie : 06/06/2025 | Réalisation : Dan Trachtenberg, Joshua Wassung | Séance spéciale
Il y a des privilèges qu’on ne se refuse pas. Sorti début juin sur la plateforme Disney+, Predator : Killer of Killers passait sur grand écran au festival d’Annecy. C’est le dernier film de Dan Trachtenberg et Josh Wassung, avec qui on a échangé à l’issue de la séance. Conçu comme une anthologie, le film nous plonge à trois périodes différentes : celle des Vikings, celle du Japon féodal et au cœur de Pearl Harbor. Trois moments clé de l’histoire, prétexte à un déluge de combats féroces entre le monstre culte et les meilleurs guerriers de chaque époque. Diablement bien animé, ce bijou d’animation s’inscrit dans la vague initiée par Spiderman Into The Spiderverse. Après le sympathique reboot Prey, néanmoins plutôt sage, Dan Trachtenberg va bien plus loin en termes de gore. On s’est d’ailleurs demandé comment le studio avait pu faire valider certaines scènes par Disney, peu amène quand il s’agit de parler d’hectolitres d’hémoglobine. Le projet a été en réalité davantage piloté par 20th Century Studios, à qui l’équipe a présenté une scène de démembrement particulièrement graphique en guise de test. Passée comme une lettre à la poste, la séquence a permis au studio d’avoir carte blanche. Avec son scénario qui tient sur un timbre post, Predator : Killer of Killers est avant tout conçu comme un pur film d’action. Derrière le projet, on retrouve aussi des animateurs qui ont officié dans le jeu vidéo et notamment sur la franchise Doom, bien connue pour son côté viscéral. Et ça marche ! Un très bon divertissement qui montre que les créatifs ne sont jamais aussi bons que quand ils sont libres.
Verdict : 🔥🔥🔥🔥
Le Palmarès
Longs métrages
Cristal du long métrage
ARCO
Prix du Jury
CHAO
Grand prix Contrechamp
ENDLESS COOKIE
Prix du Jury Contrechamp
GWANG-JANG
Prix Fondation Gan à la diffusion
OLIVIA ET LES TREMBLEMENTS DE TERRE INVISIBLE
Prix du public
AMÉLIE ET LA MÉTAPHYSIQUE DES TUBES
Prix Paul Grimault
PLANÈTES
Courts métrages
Cristal du court métrage
LES BOTTES DE LA NUIT
LES BÊTES
Prix du public
LES BOTTES DE LA NUIT
Prix Jean-Luc Xiberras de la première oeuvre
ZWERMEN
Prix Alexeïeff – Parker
SAPPHO
Le reste du palmarès 2025 est accessible ici.
Critique JV et ciné toujours prêt à mener des interviews lors de festivals ! Amateur de films de genre et de tout ce qui tend vers l'Etrange. N'hésitez pas à me contacter en consultant mon profil.
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