Damien Leone revient encore et toujours – et avec sa même recette artisanale, même si les ordres de grandeur ont changé – à son personnage favori : Art le clown. Et avec ce Terrifier 3, il fait péter les box-offices sans commune mesure et élargit encore un peu plus sa mythologie horrifique. Prenez garde, ça tache !

Un p'tit tour et ça revient...

Si vous suivez les déambulations d’Art le clown – The 9th Circle (2008), puis Terrifier (2011), qui se retrouvent tous deux combinés dans un long-format dénommé All Hallows’ Eve, puis Terrifier (version long-métrage), Terrifier 2 (ça commence à faire beaucoup) et maintenant le troisième volet – vous avez eu le temps de découvrir le genre d’univers complètement barré développé par Damien Leone. Un Univers sous forme de microcosme, qu’il n’a de cesse de faire enfler, enfler, enfler jusqu’à obtenir de véritables boursouflures horrifiques (ce n’est pas négatif, nous y reviendrons), poussant toujours plus loin les frontières de la transgression.

Ici, le terrible Art (toujours incarné par le génial David Howard Thornton) accompagné par (l’immonde) Victoria retrouve sa cabosse après se l’être faite tranchée par Sienna (Lauren LaVera) à la fin du second volet. Un sommeil de quelques années, et voilà qu’un démolisseur réveille les deux entités endormies dans une bâtisse abandonnée, dans une scène (évidemment) bien sanglante. Tandis que le clown rassasié par sa vendange de sang retourne errer en ville, il va finir par recroiser la route de Sienna qui croit halluciner…

Comme d’habitude, ce n’est pas sur son intrigue que Terrifier 3 va capter son spectateur. C’est même plutôt une excuse pour ré-organiser le duel Sienna/Art dans ce troisième volet. Non, ce qui est captivant avec cette saga c’est notamment la force de frappe qu’atteint Leone en gardant son indépendance vis-à-vis des studios et sa volonté de fait-main malgré un budget bien plus confortable que les précédents volets (le succès de Terrifier 2 est passé par là). Son autre audace ? Celle de toujours vouloir pousser plus loin les potards du gore et du politiquement incorrect, clouant le bec aux critiques de misogynie imputés aux précédents volets : hommes, femmes, enfants, tout le monde en prend pour son grade avec notre très cher Art.

Logique du toujours plus

Cette volonté du toujours plus s’accompagne dans ce troisième volet avec une intégration plus prégnante de l’aspect sexuel. Mamelle indissociable de l’horreur, ce mariage freudien contre-nature de la pourriture et du charnel a fait les grandes heures du cinéma d’exploitation (nous en parlions dans un article lors de la sortie d’Alien Romulus) et sa veine bien racoleuse. Ici, la velléité est tout autre : gratter – avec des ongles jaunes et ébréchés – un peu plus profondément dans la plaie du malaise. Couche de sordide supplémentaire. Glaçage saveur hémoglobine sur une forêt noir au boudin. Pas de doute, ça ne pouvait que fonctionner…

Entre une scène d’onanisme féminin riche en hémoglobine, une (très) gênante tension sexuelle naissante entre Art le clown et Victoria mais aussi et surtout une scène de douche assez mémorable rejouant la scène de débitage de corps cette fois-ci en version masculine, le sexe traverse ce Terrifier 3. Et force est de constater : Leone tient ses promesses. Certes (comme pour le précédent volet) on aurait pu tronçonner quelques longueurs par-ci par-là pour rendre plus nerveux ce long-métrage qui tire toujours un peu trop en longueur, vous ne verrez rien d’aussi outrageux au cinéma cette année. Une (belle ?) surprise donc, portée par Shadowz et ESC en salles dans un pari audacieux et relevé malgré l’interdiction au moins de 18 ans ! Terrifier 3 a en effet fait exploser les compteurs du box-office et c’est tant mieux. Et vu la fin du film et ces chiffres d’entrées, Art a encore de beaux jours devant lui !

Buvant les Stephen King comme la sirupeuse abricotine de mon pays natal, j’ai d’abord découvert le cinéma via ses (souvent mauvaises) adaptations. Épris de Mrs. Wilkes autant que d’un syndrome de Stockholm persistant, je m’ouvre peu à peu aux films de vidéoclub et aux poisseuses séries B. Aujourd’hui, j’erre entre mes cinémas préférés, les festivals de films et les bordures de lacs helvétiques bien moins calmes qu’ils en ont l’air.

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KillerSe7ven
Administrateur
2 mois

Encore passé un bon moment en regardant la film, c’est étrange à écrire comme ça j’en conviens. La première scène est franchement excellente. Idem pour la rencontre avec Santa… la boucle est bouclée. Art avait toujours eu un côté père Noël avec sa hotte, j’ai trouvé l’idée très bonne. Celle de la douche est sympathique aussi mais on sent quand même que le film commence à s’étioler avec un petit effet redite sur la longueur. Reste l’idée assumée d’Art sans tête, le virage vers Freddy déjà engagé avec le second et un duel à venir qui j’espère se clôturera par autre chose qu’une happy end.

Je reste un éternel fan du premier pour son côté film fauché au rythme imprévisible. Un dimant noir sans concession et nettement moins guignolesque en termes de ton. J’aime un peu moins le côté diabolique qui apparaît dans ce troisième volet et surtout le personnage de Victoria qui casse l’originalité des silences et le côté film muet. C’est le plus gros point noir pour moi et j’espère qu’on se débarrassera du personnage dans le prochain.

“Mamelle indissociable de l’horreur, ce mariage freudien contre-nature de la pourriture et du charnel a fait les grandes heures du cinéma d’exploitation (nous en parlions dans un article lors de la sortie d’Alien Romulus) et sa veine bien racoleuse. Ici, la velléité est tout autre : gratter – avec des ongles jaunes et ébréchés – un peu plus profondément dans la plaie du malaise. Couche de sordide supplémentaire. Glaçage saveur hémoglobine sur une forêt noir au boudin. Pas de doute, ça ne pouvait que fonctionner…” Je n’aurais pas dit mieux ! 👌

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