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Enième macaron conso à la valeur semblable à celle du label rouge pour les jambons Herta, les Golden Joysticks Awards viennent de récompenser Sea Of Stars juste après son succès aux Game Awards (autre imposture du milieu). Le titre revendique son amour du RPG japonais. Derrière sa plastique chatoyante et ses animations léchées, que vaut le jeu de rôle bariolé des québécois de Sabotage studio ? Coup de gueule d’œil sur un jeu qui m’a laissé sur le carreau après une interminable ouverture sans les moindres prémisses d’enjeux ludo-narratifs.
Ostie, que c’est beau !
Secret of Mana, Suikoden, Final Fantasy, EarthBound, Valkyrie Profile, Dragon Quest et tant d’autres pépites émerveillèrent toute une génération de joueur avant de devenir des références inégalées du genre. Plus de trente ans après cette déferlante artistique, c’est la saison des revivals avec l’excellent Star Ocean The second story R, Baten Kaitos ou encore Mario RPG. Force est de constater que la nostalgie sait aussi satisfaire l’appétit des actionnaires que le quadra débonnaire en mal de pixels. Avec un tel héritage, les sorties contemporaines sont toujours scrutées avec attention. Avec son écrin tout droit sorti des années 9O, le jeu caresse la croupe des amoureux de l’âge d’or du JRPG. Mais que se cache-t-il derrière cette apparence aguicheuse ?
Ah Sea of Stars, on t’attendait comme le messie après l’exubérance et l’insolence de l’excellent The Messenger (voire notre interview) et son gameplay si ciselé. On cherche encore le lien de parenté du titre après une petite dizaine d’heures de jeu laborieuses. C’est aujourd’hui Thierry Boulanger qui tient les rênes du studio en tant que PDG après le départ de Martin Brouard de Sabotage. Dès le début, il n’a pas caché sa volonté de réaliser un jeu inspiré de Chrono Trigger et Super Mario RPG :
« Sea of Stars pourra être rangé chez les joueurs sur les mêmes étagères que les jeux dont il s'est inspiré »
Thierry Boulanger, PDG de Sabotage.
Dans Seo Of Stars, on retrouve le compositeur Eric W. Brown et Yasunori Mitsuda, déjà derrière les OST des jeux Xenoblade. Argument marketing oblige, le casting se targuait également de la présence de Nobuo Uemastsu à l’origine de la bande originale de l’illustre Chrono Trigger. Sea of Stars, c’est un peu comme les Rolling stones en concert, ça en jette mais ça sent terriblement le sapin aujourd’hui ! En quelques heures de jeu, l’OST est de qualité mais ne surprend pas, tout en tombant dans l’écueil de la chansonnette qui vous nécrose la cervelle à chaque combat. Et diable que ces derniers sont barbants. Si Sea Of Stars peut s’enorgueillir d’avoir un enrobage de luxe, son contenu ludique frise le néant. Explications.
Câlisse, que c’est chiant !
D’abord, cinq heures après un début de jeu garanti sans enjeux, on continue de spammer les mêmes deux attaques sans skill contre des ennemis insipides. Alors qu’il s’inspire de parangons de l’action RPG, où le tour par tour entretient un certain dynamisme par des actions défensives et offensives en semi-temps réel, Sea Of Stars ne parvient jamais à dessiner un début de plaisir, la faute à un gameplay négligé.
Là où Mario and Luigi Superstar Saga savait insuffler un vent de folie et garantir une précision d’horloger grâce à un timing visuel et sonore remarquable, le jeu de Sabotage manque de nervosité et d’ambition. La permissivité des animations nuit à la profondeur. Pis encore, les mêmes attaques où un boomerang ricoche ad eternam sur les ennemis dynamite un gameplay sous naphtalines. C’est le cas de la spécialité Moonerang de l’héroïne par exemple. Pour récupérer d’autres attaques et profiter des combinaisons en duo, il faudra patienter beaucoup trop longtemps. C‘est du crisse de taponnage comme on dit au Québec ! Oui, Sea of Stars est radin et se concentre trop sur l’accessoire plutôt que le principal.
C’est d’autant plus ballot pour un RPG où la routine des combats se doit de maintenir un tant soit peu le joueur en haleine, soit par un système bien rodé, soit par un gameplay grisant, soit les deux dans le meilleur des mondes. Le jeu ne parvient pas non plus à se démarquer par sa difficulté inexistante. Certaines options de gameplay témoignent également du manque de confiance des développeurs dans leur coredesign. Il est ainsi possible d’inclure une option soins automatiques après chaque combat comme si le studio voulait immédiatement saboter sa mécanique de cuisine sensée nous permettre de concocter de précieux remèdes. C’est beau mais tellement rébarbatif. Et pourtant les combats sont si peu stimulants qu’on finit par activer cette relique d’aide pour avancer plus vite dans l’histoire.
Tabernacle, vous avez quelque chose à raconter ?
Sur bien des aspects, Sea of Stars rappelle Magical Starsign, un autre jeu d’une beauté renversante et inversement proportionnelle à l’ennui qu’il suscitait chez le joueur. Ce RPG sorti sur DS avait au moins le mérite d’exploiter les fonctionnalités du double écran et de générer des attaques impressionnantes qui occupaient tout l’espace. En dehors des combats, on dirait que Sabotage cherche à maintenir le joueur éveillé en faisant systématiquement quelque chose lors de l’exploration des mondes. On se retrouve souvent à grimper, se plaquer sur une paroi ou sauter d’une cascade mais sans jamais ressentir l’authenticité d’un monde finalement totalement linéaire. Comme s’il fallait simuler l’action même résiduelle face au vide.
Ne parlons pas des énigmes qui consistent à pousser des objets… Jonathan Blow va faire une syncope ! On les enchaîne comme une réminiscence de tous ces jeux sans idées qui se sont toujours copiés sans réfléchir une seconde au bien-fondé de leurs bases élémentaires. Il y avait pourtant matière à exploiter davantage la mécanique temporelle pour passer du jour à la nuit à l’instar des mondes en miroirs de A Link to the Past. Pour toutes ces raisons précitées, la répétitivité m’aura fait renoncer à la poursuite de l’aventure au bout d’une petite dizaine d’heures à l’encéphalogramme plat comme une carpette, tant d’un point de vue ludique que narratif.
C’est simple, à ce niveau de l’aventure, nos chevaliers étaient toujours incapables de voir poindre la moindre menace malgré leur entraînement de GI du solstice. Cruelle erreur en termes d’écriture, alors qu’on espérait au moins se raccrocher au scénario après avoir fait le deuil du gameplay. C’est simple en deux fois moins de temps sur un JRPG comme Star Ocean The Second Story R, j’avais déjà échappé à un mariage forcé, battu des pauvres bougres transformés en démons, essuyé un séisme et sillonné les quatre coins du monde pour échapper à l’Armageddon promis par des destructeurs de planètes sauce Freezer ! Dans Sea of Stars, j’étais encore en train de faire la popotte entre deux combats contre des chenilles. C’est pas ma guerre comme on dit !
Les copains d’abord (ou pas)
En fait, c’est presque le Harvest Moon du JRPG et encore la vie d’agriculteurs était plus croustillante avec des relations attachantes entre les personnages là où Sea Of Stars joue la carte de la mièvrerie à tout prix. Si Sea Of Stars est une « lettre d’amour » au JRPG comme on peut le lire un peu partout, c’est qu’elle a été écrite avec Chat GPT tellement l’orginalité s’évanouit face à autant de bons sentiments. Même quand le fidèle compagnon perd un œil face à un monstre de bas étage, ses amis n’en ont rien à cirer. Sympa la camaraderie ! Si la légèreté a souvent fait partie du ton général de JRPG, ce n’est pas pour autant que le genre n’a pas des choses à dire.
C’est même le pacte tacite de tout bon jeu de rôle. En s’enfermant dans son trio de personnages aseptisés, Sea of Stars donne l’impression de n’avoir rien à raconter, ce qui est d’autant plus gênant pour un jeu qui s’ouvre sur un conteur qui nous promet monts et merveilles. A moins de changements en internes, on peine à comprendre cet échec après l’excellence de l’écriture des savoureux dialogues de The Messenger.
Alors certains me diront peut-être que je ne suis pas patient et que la trame se libère après. On sait combien les débuts de RPG sont parfois laborieux, mais quand on a le même mois des gros calibres du type Baten Kaitos, Star Ocean ou encore Super Mario RPG, on ne peut que vous inciter à passer votre chemin pour ceux qui sont hermétiques au verbiage et gameplay inutiles. Les autres trouveront peut-être un amuse-bouche entre deux pointures. Conformiste sur tous les plans, Sea of Stars a tout de l’élève qui recrache son manuel par cœur mais sans aucune personnalité. Un récital qui se sera contenté de répéter le maître, l’audace en moins… Sea of Stars ne fait rien de mal mais rien de bien. Tabarnouche, quelle déception ! On avait tellement envie de l’aimer.
Critique JV et ciné toujours prêt à mener des interviews lors de festivals ! Amateur de films de genre et de tout ce qui tend vers l'Etrange. N'hésitez pas à me contacter en consultant mon profil.
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