Après les remarqués Mandy (2018), Prisoners of The Ghostland (2021) et Dream Scenario (2023), le cygne noir d’Hollywood n’en finit plus de gâter les fans de films de genre. Nicolas Cage revient dans un rôle taillé sur mesure où il incarne avec maestria un détraqué et tueur en série insaisissable. Lee Harker, nouvelle recrue du FBI jouée par l’actrice Maïka Monroe travaille sans relâche pour résoudre l’enquête et empêcher qu’il ne prenne la vie d’autres familles. Un tête-à-tête implacable à qui a déjà conquis le public américain.
A couteaux tirés
L’ouverture de Longlegs joue la carte de l’inventivité avec un cadre au ratio 4:3 aux bords arrondis pour mieux retranscrire une certaine idée d’une époque, comme une fenêtre propre à l’enfance. Comme un lointain reliquat d’un cauchemar de jeunesse resté gravé dans nos mémoires. C’est dans ce cadre enneigé que Longlegs annonce d’entrée de jeu son atmosphère glaciale. Une petite fille, intriguée par l’arrivée d’un visiteur inattendu jette un œil vers un véhicule stationné devant la maison de cette banlieue pavillonnaire. A l’image des jump scares de Slender Man, Longlegs apparait à hauteur d’enfant, d’abord le corps puis le buste, presque pétrifié comme Jack Nicholson dans le labyrinthe de The Shining. Une musique stridente retentit, l’image s’évanouit… et notre mémoire rétinienne gardera le souvenir fugace d’un Nicolas Cage qui se fera désirer une bonne partie du film.
Méconnaissable, le teint blafard, les lèvres gonflées à l’excès, l’acteur coutumier des rôles transformistes nous offre une nouvelle déclinaison de la figure du croquemitaine. Son visage presque tuméfié par des années de Botox rappelle l’outrance du personnage de la belle-mère dans Amelia’s Children mais en limitant ses apparitions au strict minimum. On devine encore difficilement l’Homme derrière ce visage défiguré, caricature d’une vieille bourgeoise de Palm Beach qui aurait abusé des liftings. Soudain les bords de l’image s’étirent lentement jusqu’à remplir toute la toile et basculer vers l’enquête du FBI. Le message est clair. L’horreur se distille tel un poison qui se diffuse dans l’organisme et qui ne nous laissera aucune échappatoire.
Dans le film d’Oz Perkins, Lee Harker dispose d’un don de prescience qui rend sa capacité d’analyse exceptionnelle. Et c’est le principal moteur narratif. Si les déterminants de l’affaire restent anecdotiques, Longlegs mise tout sur son ambiance. Alors que les cadavres s’empilent et que l’énigme semble de plus en plus insoluble, l’enquête rend le spectateur de plus en plus confus sur la nature de la menace. En permanence Longlegs joue les funambules sur cette ligne de crête entre surnaturel et réalité.
Silence of the Lambs
Avec son intrigue chapitrée, Longlegs sait entretenir son suspens en construisant une ambiance de plus en plus suffocante. La composition des plans est ciselée et la photographie élégante. L’histoire rappelle immédiatement Le Silence des Agneaux tout comme le travail de Fincher sur les films Se7en et Zodiac. Maïka Monroe, l’actrice remarquée d’It Follows et de l’excellent Watcher (lire notre critique) livre elle aussi une performance magnétique. Celle qui est souvent choisie pour incarner des personnages taiseux fait reposer tout son jeu sur l’intensité du regard, véhicule roi de l’émotion et d’une tension contagieuse. Son talent n’est plus à démontrer et on est désormais curieux de voir si elle saura reproduire le succès d’It Follows pour sa suite inattendue.
Fort d’une communication exemplaire sur les réseaux sociaux, Longlegs fait partie de ces films qui ont réussi à ne quasiment rien montrer si ce n’est une seule et unique séquence devenue virale. Le teaser partagé sur les réseaux prétend que qu’au moment de confronter Longlegs, le rythme cardiaque de l’actrice serait passé de 76 BPM à 170 BPM. Anecdote de tournage qui fait sens, Oz Perkins, le réalisateur du film a décidé de garder Maïka Monroe et Nicolas Cage séparés durant tout le tournage. L’actrice n’aurait eu droit à aucun aperçu de l’apparence de l’antagoniste du film avant cette scène tardive et déjà culte. Légende ou réalité ?
The first time Maika Monroe saw Nicolas Cage as Longlegs, her heart rate hit 170 bpm.
— ↃL⊥\\Ↄ—\\ᘰ (@LonglegsFilm) July 8, 2024
LONGLEGS opens in theaters Friday: https://t.co/3tgjmFAPLc pic.twitter.com/DaweYaDgxM
Une chose est sûre, le fait d’avoir choisi de jouer sur le hors champ tout en dosant les apparitions du tueur en série participe à renforcer la puissance de suggestion, à l’image des vieux films d’horreur qui savaient faire confiance au spectateur et ses démons. Dans la veine des meilleurs films d’horreur de ces dernières années, Longlegs montre s’il le fallait encore combien la figure du croquemitaine est inépuisable. Un film délicieusement glacial à soutenir au cinéma.
Bande-annonce de Longlegs
Critique JV et ciné toujours prêt à mener des interviews lors de festivals ! Amateur de films de genre et de tout ce qui tend vers l'Etrange. N'hésitez pas à me contacter en consultant mon profil.
Infos divers
: 10 juillet 2024
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J’ai pas mal attendu ce film, surtout après ces bandes d’annonces super efficaces… et ce malgré Perkins à la réalisation, (je ne suis pas un grand fan de ses précédents films). J’ai été pas mal déçu, le film développe de bonnes idées sans jamais réellement les exploiter, il y a peut-être trop de matériel et finalement on ne creuse rien concrètement. Nicolas Cage est génial, comme dans pas mal de ses rôles (il y a toute une histoire autour de la création de son personnage lors de l’écriture du scénario), mais cela ne suffit pas à combler d’immenses lacunes dans ce film.
Maika Monroe que j’aime beaucoup campe une enquêtrice avec tics « prisonniers et Jake Gyllenhaal » drivée par son supérieur du FBI, cliché absolu. L’enquête est résolue en quelques scènes, la fin plus que prévisible… il n’y a aucun lien avec Le Silence des Agneaux au niveau de l’impact, du grain, de l’atmosphère… Longlegs manque de crasse, de prise de risque, d’une image peut-être moins léchée. Les bons points du film sont finalement à chercher du côté de la représentation du diable et de la possession à la Amityville, certaines scènes avec la poupée fonctionnent vraiment bien et la bande son est assez efficace, (sons à l’envers…). Mais globalement ce film selon moi ne restera pas dans les annales du cinéma de genre.