Inexorable. Issu du latin inexorabilis, « qu’on ne peut pas fléchir par des prières, auquel on ne peut se soustraire, implacable ». Un titre tout trouvé pour ce nouvel home invasion psychologique, où la chute semble inévitable. Après le succès de son premier roman – du même nom que le film – Marcel n’a jamais réussi à renouer avec la réussite. Alors qu’il emménage avec sa femme et sa fille dans ce splendide manoir, l’écrivain est pris en étau entre le vertige de son ancien succès qui le hante et la confiance aveugle portée par se femme et éditrice qui croît en son talent. Thriller en huis clos où les rapports de classe comme de désir s’affrontent et se déconstruisent, Inexorable était présenté en avant-première à l’Étrange Festival et au FEFFS. Nous avons eu le plaisir d’échanger avec son réalisateur, Fabrice du Welz, sur ses inspirations et son approche artistique.

Les fleurs du mal

Marcel n’est ni un parvenu, ni un artiste accompli. Depuis son bestseller, il bénéficie du soutien sans faille de sa femme, sans qui rien n’eut été possible. Leur emménagement dans ce manoir qui appartenait à son beau-père, est aussi l’héritage d’autres figures tutélaires de la réussite sociale. Au milieu de ce terreau bourgeois surgit Gloria (Anna Gaïa Bellugi), jeune fille désœuvrée, qui à l’instar de la déesse grecque Eris va jeter la pomme de la Discorde jusqu’à ébranler les fondations même de la famille, s’immisçant toujours plus loin dans l’intimité de l’artiste.

Si la structure même d’Inexorable est classique dans la forme, Fabrice Du Welz parvient à révéler toute la profondeur du duo malsain formé par Anna Gaïa Bellugi et Benoît Poelvoorde, précipité cette fois-ci dans un rôle inhabituel et dramatique pour cet acteur plus coutumier des situations humoristiques. Ce dernier incarne avec panache l’artiste torturé à l’inspiration en berne pour un rôle finalement taillé sur mesure. Alors que son désir grandit pour Anna Gaïa Bellugi, chaque plan est l’occasion d’un regard ou d’un nouvel espace d’intimité effrontée devant la maîtresse de maison (Mélanie Doutey) qui, impuissante, ne peut à aucun instant envisager l’impensable.

« On reconnaît la passion à l’interdit qu’elle jette sur le plaisir. »

Fabrice du Welz
Fabrice Du Welz

La distance qui sépare les personnages par le vouvoiement se réduit et le désir couplé à l’interdit devient fatalité. Chaque mot est à double tranchant, chaque scène est l’occasion d’une inéluctable tension sexuelle. Gloria est très jeune et Marcel, marié, père établi socialement mais fatigué par les années. Peut-on réellement parler de rivalité entre Gloria et Jeanne alors que tout les sépare ? Quel est le prix à payer de la transgression ? Inexorable est un thriller haletant et efficace où situations et personnages s’érodent devant la fatalité. Fabrice Du Welz revient sur son rapport aux acteurs et à la mise en scène. Sortie en salle prévue en janvier 2020 en France. Un film à ne pas manquer cet hiver !

Critique JV et ciné toujours prêt à mener des interviews lors de festivals ! Amateur de films de genre et de tout ce qui tend vers l'Etrange. N'hésitez pas à me contacter en consultant mon profil.

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[…] métrage de Joséphine Darcy Hopkins, déjà co-scénariste du thriller Inexorable (lire notre critique), Le jour où Maman est devenue un Monstre est d’une efficacité redoutable. Comme son nom le […]

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[…] qui confine à l’exaltation divine. Il y a celui de de Gloria (Anna Gaïa Bellugi) dans Inexorable où la jeune femme ne parvient qu’à effleurer l’assouvissement de son désir par l’abolition […]

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