La franchisation, après avoir rendu exsangue tant et tant de sagas (nous parlions récemment de Scream, d’Halloween, de Star Wars) et tandis que nos genoux tremblent face à l’arrivée imminente du dernier volet des Gardiens de la Galaxie ou encore de l’énième Indiana Jones (présenté par James Mangold sur la Croisette), voilà qu’Hollywood s’empare du jeu de rôle et met le grappin sur D&D pour produire : Donjons & Dragons, L’Honneur des voleurs.

Craindre le pire

Mythique geekerie que l’on retrouve, entre autres, dans E.T. ou plus récemment dans Stranger Things, les premières images de bande-annonce pouvaient laisser craindre le pire. Fan service lourdingue, effets spéciaux à la ramasse, histoire tirée par les cheveux et cet humour qui neutralise tout, comme dans tant de productions du MCU. Pourtant, il nous restait quelques signes synonyme d’espoir…

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Lueurs d'espoir

La première lueur d’espoir, la présence du duo John Francis Daley et Jonathan M. Goldstein à la barre : pas forcément très identifiés, ils étaient les réalisateurs de Game Night en 2018. La comédie slash thriller mettait en scène Jason Bateman, Rachel McAdams et un pauvre (mais très chou) westie. Un film sacrément bien mené, avec un juste dosage entre humour et suspens, qui fait passer son heure et demi sans le moindre ennui et avec une réelle maitrise de son tempo.

« Game Night » (2018), par le même duo de réalisateurs

Seconde lueur d’espoir ? Le refus du tout numérique. Certes, D&D nécessitera l’emploi d’un nombre incalculable d’effets spéciaux, mais le duo de réalisateurs a choisi de garder une bonne partie d’effets pratiques. Et ça se voit à l’écran et donne un côté certes rétro, mais extrêmement tangible au long-métrage (voir vidéo ci-dessous). Un choix d’autant plus judicieux qu’un véritable et passionnant bestiaire est déployé. Mais d’où viennent donc toutes ces bestioles ?

Influence(s)

Peu importe ce que l’on pense des films en question, de nombreux films récents montrent peu d’inventivité quant à la constitution de leurs créatures. Bien loin d’un Avatar 2 où toutes les bêtes ne semblent être que des hybrides d’animaux terrestres bien identifiés, D&D offre un bestiaire truculent : le génial dragon obèse, le complètement WTF hibours, les hilarants squelettes de guerriers, les chiens-cervelles qui s’attaquent aux esprits les plus affûtés, etc. Et en parlant de ces derniers, il convient d’évoquer une source d’inspiration notoire de ce long-métrage : Beksiński.

En effet, le long-métrage D&D est ultra référencé… Les clins d’œil au Seigneur des anneaux sont évidents (Jackson semble à jamais avoir imposé sa vision au filmage de la fantasy au cinéma), ceux à la saga Harry Potter également; mais s’il y a bien un artiste qui transpire tout au long du film, mais dont l’imagerie est relativement peu reprise dans les blockbusters actuels, c’est bien Zdzisław Beksiński. Le peintre torturé polonais et son univers cauchemardesque s’accorde relativement mal avec les films grand-publics, et pourtant D&D parvient à y puiser de véritables inspirations surréalistes. Nous parlions des chiens-cervelles qui semblent tout droit tirés de son œuvre (image ci-dessus), mais aussi de la construction de certains paysages, comme ceux avant sa rencontre avec le dragon obèse.

Conclusion

Alors ne nous y trompons pas, D&D est bien loin de l’âpreté de l’Univers de Beksiński. Par son humour (souvent bien trouvé), son côté pop et une retenue un peu trop marquée sur les effets gores (malgré sa violence, pas une goutte de sang, ou presque, ne sera versée), Donjons & Dragons version ciné est décidément trop sage. On pourrait se plaindre également de quelques ressorts scénaristiques trop évidents et de certaines longueurs, bien que les multiples climax (éreintants !) du dernier tiers ne laisseront au spectateur que bien peu de répit. Bref, Donjons et Dragons: L’Honneur des voleurs, malgré ses imperfections, est une belle surprise comme on voudrait en voir plus dans la sélection des blockbusters actuels !

Buvant les Stephen King comme la sirupeuse abricotine de mon pays natal, j’ai d’abord découvert le cinéma via ses (souvent mauvaises) adaptations. Épris de Mrs. Wilkes autant que d’un syndrome de Stockholm persistant, je m’ouvre peu à peu aux films de vidéoclub et aux poisseuses séries B. Aujourd’hui, j’erre entre mes cinémas préférés, les festivals de films et les bordures de lacs helvétiques bien moins calmes qu’ils en ont l’air.

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