Attendu comme le loup blanc par toute une génération biberonnée par Toy Story, Buzz l’Éclair était un projet tout ce qu’il y a de plus enthousiasmant : découvrir l’Homme derrière la légende du jouet au scaphandre vert et à la cagoule violette. Un doux mélange de nostalgie conjugué à la volonté de proposer quelque chose d’autre à un public qui avait désormais passé la barre des trente ans depuis les premières envolées du studio Pixar, propulsé par le phénomène Toy Story en 1995. Entrevoir l’Homme derrière le bout de plastique qui crevait l’écran des premiers films d’animation entièrement réalisés par ordinateur sonnait comme une idée réjouissante. Jurassic Park avait donné vie au dinosaures, Pixar réveillerait l’âme de notre enfance. 27 ans plus tard, que reste-t-il du ranger de l’espace ?

Buzz l'Eclair à la rescousse...

Disney (qui en 2006 avait racheté Pixar) a donc confié la tâche au réalisateur Angus MacLane de faire revivre la légende. Le film débute immédiatement par ce côté méta en nous proposant de découvrir la véritable histoire du plus célèbre ranger de l’espace, l’histoire qui inspirerait tout un tas de bambins en culottes courtes en 1995 et aujourd’hui en bermudas, plombés par la canicule. Présenté en avant-première à Annecy, la salle était comble et Disney avait même encore fait monter le thermomètre en proposant un vaste jeu interactif avant la projection de la séance, l’occasion de se bourrer le pif contre Paris, New York et Sydney en exhibant joyeusement ses aisselles pour braquer ses bras du bon côté sur un jeu de rythme improvisé pour le lancement. Un moment sympathique qui rappelle que le cinéma est également affaire de partage et de propriété commune.

Suite au triomphe du public annécien, c’est donc dans la moiteur et les vapeurs lymphatiques que la séance a débuté joyeusement. On découvre Buzz qui a subi un ravalement de façade réussi pour ressembler au jouet tout en restant humain. Suite à un naufrage sur une planète hostile (et située à 4,2 millions d’années-lumière de la planète Terre), Buzz endosse la responsabilité de son intrépidité et se donne pour mission de ramener la colonie à la maison. Seul bémol, le module du vaisseau mère, une sorte de cristal, a subi des dégâts conséquents et Buzz va devoir trouver un moyen pour le recharger.

Space oddity

Alors qu’il entreprend un voyage avec un vaisseau d’appoint autour du soleil pour recharger le cristal, Buzz découvre que le temps qu’il a passé dans l’hyperespace dure quatre ans sur la planète colonisée. C’est donc à une forme de course contre la montre que Buzz est soumis, son amie et toute la colonie vieillissant d’un coup à chaque escapade. On assiste malheureusement un peu circonspect à cette première partie qui s’étale en longueur sans prendre le temps de poser ses personnages. On sent que Pixar chercher à nous émouvoir mais le procédé est particulièrement maladroit. Mettre la charrue avant les bœufs et nous priver de certains protagonistes si vite ne marche pas quand on nous l’a présenté quelques minutes à peine, sauf dans des chefs-d’œuvre comme The Last of Us où l’écriture est d’un tout autre niveau.

Pixar abuse des plans où les yeux des gamins s’ouvrent comme une fleur en regardant Buzz. Le sourire ne quitte jamais les visages, même dans des moments plus périlleux. Il n’y a rien de plus maladroit que de suggérer au spectateur quand il doit ressentir quelque chose quand rien ne se produit à l’écran. Si dans Jurassic Park Spielberg campe la caméra sur Sam Neil et Laura Dern, les yeux ébahis, c’est pour mieux faire monter la sauce alors qu’on aperçoit les dinosaures pour la première fois. Mais ici rien ne vient justifier cette tartine d’émotions précalculées sans jamais considérer l’intelligence du spectateur.  On sourit parce qu’il faut sourire, point !

Privé de l’un de ses principaux soutiens, Buzz va donc devoir mener sa mission seul… jusqu’à ce qu’il rencontre une bande de pieds nickelés : de jeunes recrues téméraires (mais incapables) et Sox, un chat robot qui fait office de gag tout au long du film. Zurg et son armée de robots viennent enfin compliquer la mission que s’était donnée Buzz. Le dernier né de chez Pixar peine à poser ses enjeux. Les robots n’interviennent que tardivement dans le film et ne présentent aucune menace ni originalité.

Vers l’infini et l'au-delà (de l’ennui)

C’est malheureux mais Buzz n’arrive jamais à poser son ambiance et il serait injuste d’incriminer son caractère tous publics. D’autres films Pixar avaient très bien un double niveau de lecture systématique. Dans d’autres films destinés à des publics ouverts comme Dark Crystal, l’irruption des Skeksès imposait tout de suite le respect par exemple. Mais ici tout semble lisse et plat. Ni les héros ni les ennemis ne semblent impliqués dans cette aventure qui ressemble bien trop à une mauvaise quête annexe de jeu vidéo.

Pire encore, seuls trois types d’ennemis feront obstacle à Buzz et autant dire que les confrontations sont aussi rares qu’insipides. Quelques ronces, des insectes et des robots… et c’est tout. On en attendait davantage d’un film qui aurait mieux fait de lorgner du côté du space opera. Même Buzz jette son arme derrière lui dès le début du film après avoir tiré trois coups de feu, comme si lui-même rendait le maillot…

Buzz

Question variété, Angus MacLane est trop avare et se précipite dans l’écueil de nous enfermer entre d’interminables couloirs gris, plutôt que de profiter de nouveaux biomes que pourraient vraisemblablement proposer une planète de cet ordre. Entre l’écriture peu inspirée, les quelques blagues drôles avec Sox mais qui tirent malheureusement en longueur et la bleusaille sans une once de charisme, le film glisse très vite sur la pente de l’ennui et de la déception. Il n’y a ni tension qui porte l’intrigue ni grand spectacle pour compenser.

Les chorégraphies des rares combats manquent de souffle. Et même le sound design reste très effacé, à cause d’une musique orchestrale trop écrasante. Buzz est un film qui peine à convaincre d’autant plus quand on ressort des présentations de Spiderman Across the Spider-verse et du Chat Potté 2, toutes les deux autrement plus audacieuses que le dernier Pixar. Manque d’ambition ou film de commande ? Buzz n’a pas su raviver la flamme d’un univers qu’il aurait peut-être mieux fallu laisser tranquille.

Critique vidéo de Buzz

Bande-annonce de Buzz

Critique JV et ciné toujours prêt à mener des interviews lors de festivals ! Amateur de films de genre et de tout ce qui tend vers l'Etrange. N'hésitez pas à me contacter en consultant mon profil.

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[…] Or il n’y a plus rien à attendre de la franchise après le second volet. Idem pour Buzz qui était franchement nul pour du Pixar. Loin d’être un mauvais film pour autant, le […]

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