• Testé sur PC écran 4K ultra-large avec une RTX 4070 
  • Code transmis par l’éditeur 
  • Screenshots maison
  • Fini en quatre heures et des brouettes. 
  • Pratique l’escalade dans la vraie vie…
  • … va falloir s’entraîner pour détrôner ce petit bonhomme !

Le jusant est la marée descendante mais aussi ce moment délicat où les bateaux manquent de chavirer lors de l’accostage, exercice périlleux du fait des reflux de l’océan qu’on sait indomptable. Conçu comme un jeu d’escalade par le studio français Dont’t Nod avec qui nous échangions à la Gamescom, Jusant nous embarque dans la folle aventure alpine d’un jeune homme au pied marin. La montagne se marie-t-elle avec l’ivresse des profondeurs ? 

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Avec son élégante introduction et sa patte artistique tout en contrastes, difficile de ne pas tomber sous le charme des graphismes du titre. Au milieu du désert, notre personnage marche sans fléchir sous la chaleur avec un seul objectif : rejoindre les cimes d’un sommet qui semble interminable. Pas de dialogues ni de voix dans ce jeu épuré. On aura seulement droit à notre protagoniste (aussi bavard que Link) et son curieux acolyte, une petite créature bleue qui se hisse par moment sur notre tête pour interagir avec les éléments du jeu. Entre deux vaillantes ascensions, on croisera ici et là quelques bribes de textes cryptiques qui révèlent une certaine sensibilité écologique, notamment sur la rareté de l’Or bleu.

Avec ces panoramas à couper le souffle et un certain sens de la mise en scène portée par des angles de caméras vertigineux, on ressent immédiatement le mal de mer des montagnes. Les effets de lumière sont magnifiques, tout comme l’effet de chaleur qui floute légèrement la vision, à l’image des mirages perçus par les Dupondt au milieu du désert. Nos lunettes cyberpunks renvoient sans doute au côté futuriste et prépocalyptique de notre époque anthropocène. Tout en aplats de textures, ce style cartoonesque à la croisée du film d’animation et du cel shading est tout bonnement splendide. Les passages en intérieur ne sont pas en reste et on savoure avec féérie les incursions dans les crevasses où la lumière du soleil cède sa place au fourmillement des gemmes et joyaux qui ornent les murs alentours.  

Dès que le vent soufflera

Pour donner un peu de corps à l’ensemble, Dont’t Nod donne vie à cet univers avec des effets physiques convaincants. Il faut voir les bourrasques chahuter la végétation comme notre personnage dans le dernier monde pour apprécier le soin apporté à l’ouvrage. De petites créatures étranges et mignonnes parsèment également ce monde onirique sorti d’une aquarelle. Et au milieu de cette tour de granit : des épaves et reliquats d’une vie passée mais pas si lointaine qui donnent un aspect nostalgique intriguant quoiqu’un peu trop en surface peut-être. Comme si l’appel de la mer était indissociable de l’alpinisme. Un mariage original qui sera décliné avec poésie jusqu’au dénouement, où la direction artistique parvient à prendre pleinement son envol. Malgré un épilogue réussi, on reste un poil sur sa fin, eu égard à la générosité du titre sur ces quelques heures qui valent mille fois la platitude d’un jeu service sans saveur.

Outre ces qualités esthétiques, Jusant adopte un gameplay original. Si vous aussi, vous avez toujours aimé la grimpette et les cabrioles de Lara Croft sur PSone mais que vous avez en horreur les gameplay téléguidés des assassins de la franchise à succès d’Ubisoft, nul doute que vous devriez accrocher à la proposition de Don’t Nod. Tout repose sur un système d’endurance à l’instar d’un certain Breath of The Wild qu’on aurait couplé avec Heeve Ho. Pour crapahuter sur les parois rocheuses, il faut en effet appuyer sur les deux gâchettes pour contrôler chacune de vos paluches. Une pression sur le bouton action permet enfin de poser jusqu’à trois points de relais.

Sécurité oblige, la corde saura autant votre fil d’Ariane que votre fardeau quand vous aurez épuisé sa longueur. Sans jamais être un pousse stick, le jeu interdit tout game over. A défaut d’endurance, notre personnage lâchera prise et tombera jusqu’à son relai. Curieusement, le jeu rappelle parfois le feeling propre à l’excellent Heart of Darkness dans une version solaire où la mort aurait été conjurée et l’expérience rabotée. 

Un jeu ICOnique

Malgré cette absence de ludo-punition, Don’t Nod réussit le pari de nous faire ressentir le mérite de l’ascension, l’adrénaline d’un saut de cabri réussi comme de l’appréhension de la chute. Le gameplay, loin d’être automatisé comme celui des productions contemporaines, joue d’une certaine inertie couplée à la pesanteur. En faisant également largement reposer l’expérience sur l’exploration, on est à des années lumières de cette fâcheuse tendance qui consiste à barioler les corniches et éléments du décor avec lesquels interagir. Une hérésie de gamedesign ! Ici la progression se fait de manière naturelle en bonne intelligence avec les capacités cognitives du joueur.

Un cruel défaut qui, avec le côté ventouse des héros modernes, rendait l’escalade de God Of War insipide et vide de sens (lire notre critique désabusée). D’ailleurs difficile de retenir un seul souvenir du dernier opus tant l’assistanat était poussé au maximum… Dans Jusant, si les animations sont souples, le jeu souffre tout de même de quelques points d’accroches et sauts fantaisistes qui font que par moment notre petit bonhomme semble percuter des obstacles de façon originale comme un poulet sans tête qui ferait de la corde à sauter.

Puisque la chute mortelle est interdite, dans le dernier chapitre en partie horizontal, le malheureux pourra sembler contrarié par un simple caillou aux airs de citadelle invisible. Si ces quelques points entachent un peu l’ensemble, cela reste anecdotique et de manière générale, la physique et la souplesse du jeu ne font pas défaut. Conçu comme une échappée de quelques heures pour apprivoiser les cimes, Jusant pioche probablement dans l’héritage de la Team Ico tout en apportant sa graine. Les plus déterminés pourront d’ailleurs chercher à dénicher tous les secrets du titre ainsi que de magnifiques fresques à révéler par notre petit compagnon bleu azur.

Les Français de Don’t Nod ont su nous redonner goût aux cabrioles, là où tout un pan de l’industrie vidéoludique avait réussi à nous écœurer en se contentant du strict minimum ludique au profit du grand spectacle, quitte à saboter toute proposition de gameplay. Avec sa DA chatoyante, impossible de ne pas craquer sous le charme de Jusant. Idem pour son gameplay intelligent qui ne sombre jamais ni dans le pousse-stick ni dans la frustration. Certes on aurait aimé quelques heures de plus pour nous surprendre encore et pousser le gameplay à l’épuisement. Et pourtant, Jusant a suffisamment de qualités pour faire oublier sa durée de vie relativement faiblarde et ses quelques collisions importunes. Assurément l’une des plus belles découvertes indés de 2023.

Pour
  • Physique impressionnante...
  • DA et éclairages splendides !
  • Gamedesign vertical original
  • Gameplay qui fait confiance au joueur
  • OST discrète mais élégante
  • Pas de temps de chargement
  • Pas de HUD envahissant
  • Tutoriel très très discret
  • Un jeu pas bavard mais sincère !
  • La petite boule bleue trognon !
  • Le plaisir de l'escalade, ses réussites et ses échecs
Contre
  • ... mais parfois capricieuse !
  • Narration un brin superficielle
  • Collisions (parfois) grotesques
  • Durée de vie faible

Critique JV et ciné toujours prêt à mener des interviews lors de festivals ! Amateur de films de genre et de tout ce qui tend vers l'Etrange. N'hésitez pas à me contacter en consultant mon profil.

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Ummagumma
1 année

Allez, tu m’as tenté 🙂

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