• Testé sur PC avec une RTX 4070 TI en 3440 X 1440 écran ultra large.
  • Code transmis par l’éditeur.
  • Joué une petite dizaine d’heures. 
  • Le premier contact m’avait fait mettre le jeu en pause cet été… avant d’y revenir cet automne !
  •  Captures de gameplay maison.
  • Funfact : ce n’était pas une mince affaire de prendre des screens en pleine partie ! 

Depuis que Konami s’est éloigné du jeu vidéo, préférant les Pachinko et l’appât du gain, rares ont été les jeux estampillés par l’éditeur à connaître le succès. Sorti du trou noir estival, Cygni: All guns blazing n’est pas passé inaperçu et se targue d’être le renouveau du shmup à en croire un certain nombre de critiques. A viser les étoiles, le jeu de KeelWorks s’est-il brûlé les ailes ?

Une carrosserie bien lustrée

Le shmup est aussi vieux que le jeu vidéo et semble résister aux affres du temps, même si son heure de gloire semble derrière lui. Restent quelques passionnés et doloristes aguerris qui n’ont jamais quitté la barque et qui naviguent avec insolence entre les boulettes comme Sarkosy entre les condamnations. Le goût du risque, la persévérance… la crise d’épilepsie : un triptyque bien connu des amateurs du genre. Véritable fossile vivant du jeu vidéo, le shmup connaît nombre de sous-genres et autant de passionnés pour les défendre et se livrer bataille.

Qu’il semble loin le temps de Spacewar! (1961) quand on voit les graphismes de Cygni à la plastique sérieusement alléchante. Développé par des anciens de Pixar, le titre épate par sa mise en scène comme la splendeur de ses graphismes. Le jeu se paye même le luxe de courtes cinématiques qui cherchent à raconter… hum… une histoire j’imagine ? Bon, la narration est souvent le parent pauvre du genre et comme ce n’est pas envahissant ici, ne boudons pas notre plaisir. Ingame la direction artistique fait mouche et on assiste à un véritable feu d’artifices à toute allure. Chapeau bas pour la partie technique même si de rares ralentissements peuvent survenir par moments.

A gauche, Spacewar! (1961), bien avant Pong (1972) est considéré comme le premier jeu vidéo et le tout premier shoot'em up. A droite Space Invaders (1978) sera lui aussi une véritable révolution.

Même l’OST tire son épingle du jeu quoiqu’il faille un petit temps d’adaptation pour oublier les musiques frénétiques des shooter japonais. Faites le deuil des musiques de teknivals portées par des voix gothiques d’adolescentes comme les prods nippones en raffolent, Cygni préfère jouer une partition plus proche du space opera que de la fête foraine ! C’est tout de suite moins engageant mais l’OST sait aussi se libérer dans certains niveaux inspirés où des riffs improbables de guitare électrique viennent se marier à l’électro. C’est le compositeur Vatche Kalenderian à qui l’on doit la bande originale enregistrée à Hollywood’s danes le studio d’EastWest s’il vous plaît.

Cygni est une belle claque graphique et une leçon de mise en scène pour le genre !
Cygni puise ses inspirations dans tout un pan du jeu vidéo, même chez Playdead (Limbo, Inside) !

Le jeu de KeelWorks cherche clairement à s’affranchir des carcans du genre. D’abord parce qu’il ne choisit pas l’école de l’accessibilité. Bien loin de la mantra « Easy to play, hard to master », Cygni n’est pas facile d’accès et c’est le cas de le dire ! Pour limiter la casse, les développeurs ont eu la bonne idée d’inclure un tuto plutôt clair et à l’esthétique rétro minimaliste afin d’aller droit au but. Tout l’inverse de sa direction artistique chargée ingame ! Après s’être pris une raclée dans le premier des sept niveaux du jeu, on comprend vite qu’il va falloir creuser pour comprendre sa logique. Ce n’est pas la manière la plus élégante d’apprivoiser un jeu vidéo mais cette étape est essentielle pour progresser.

Des rouages grippés

Une gâchette pour le tir classique air-air et l’autre pour le tir secondaire air-sol. Une pression du stick gauche permet d’activer les drones en renfort tandis que le stick droit permet de locker les adversaires au sol ou de faire des dégâts de zones manuellement. On déplace le vaisseau tout en ajustant nos tirs selon la direction donnée au stick. On apprend toutes ces techniques unes à unes même si on comprend à notre grand désarroi que toutes ces options sont à débloquer en jouant. Ce premier point est certainement discutable car ces assists sont d’une très grande aide et certaines options comme le tir laser chargé sont primordiales pour abattre les plus gros ennemis à la jauge de PV exagérément chargée. Problème et non des moindres, pour améliorer son vaisseau, il faut finir le niveau d’une traite sans mourir en normal, ce qui rend les premiers pas dans Cygni particulièrement âpres et frustrants, d’autant plus que chaque niveau dure une quinzaine de minutes en moyenne contre moins de cinq dans l’immense majorité des shmups. N’aurait-il pas fallu plutôt choisir des vies illimitées et préférer mettre en avant le scoring ?

Les Ecossais n'ont pas lésiné sur le budget C4...

Passé quelques déculottées dès le premier niveau, il apparaît évident que le jeu a été pensé pour être joué dans un premier temps en facile pour revenir ensuite prendre notre revanche en normal, une fois toutes les techniques débloquées. Autant dire qu’il m’a fallu un certain temps pour ravaler mon égo et abaisser le niveau de difficulté ; un interdit qu’il m’a fallu franchir pour les besoins du test. Là encore, c’est un choix de gamedesign étrange, surtout quand le joueur doit se casser les dents au lieu de lui annoncer directement la couleur.

A chaque fois qu'on est touché, un triangle rouge apparaît autour de notre vaisseau jusqu'à ce que l'alarme retentisse, signe d'une mort prochaine !

Second écueil, Cygni opte pour un défilement vertical et un format 16:9 inhabituel, ce qui ne facilite pas les esquives, la faute à un manque de réactivité du joueur face à la faible distance entre le haut et le bas de l’écran. Ce n’est pas pour rien que les shmups choisissent toujours l’un ou l’autre mais pas les deux. Ce qu’on gagne en mise en scène, on le perd en lisibilité. Pis encore, les ennemis surgissent de tous les côtés et ont le nez systématiquement braqué vers notre vaisseau à la hitbox particulièrement large. Ce dernier est hyper nerveux et vu le nombre invraisemblable d’ennemis à l’écran, c’est un véritable défi pour ne pas encaisser des dégâts, pour ne pas dire que c’est impossible sur des niveaux si longs. On flotte comme une savonnette dans les douches d’une prison ou à l’instar d’une mouche qui ne saurait pas où se poser. C’est grisant, certes, mais, pour la précision, on repassera ! Un défaut qui aurait pu facilement être corrigé si le jeu avait opté pour un tir chargé secondaire dont le principal mérite réside traditionnellement dans le fait de ralentir ostensiblement la vitesse de déplacement, seul moyen pour flirter entre les boulettes d’un manic shooter.

La DA de Cygni tente un curieux mélange entre Metroïd et Overwatch !

Le shmup qui voulait les gouverner tous ?

Heureusement, contrairement à nombre de schmups où un seul contact suffit à faire exploser notre vaisseau, celui de Cygni est autrement plus robuste grâce à un système original de permutation de notre énergie entre le bouclier et la puissance de feu. D’une pression sur X, on peut ainsi basculer notre énergie jusqu’à six niveaux, chacun permettant de choisir sa propre orientation de tirs comme celle des drones. Une mécanique qui bien souvent est cantonnée au choix du vaisseau de départ dans les schmups et qui est ici ajustable en temps réel. Si l’idée est amusante sur le papier, c’est une tout autre histoire pour ajuster sa puissance de feu en pleine action. Cela donne un drôle de ballet où on cherche bon gré mal gré à éviter toutes les boulettes à l’écran et où on se rue sur les bonus d’énergie qui poppent à l’écran.  

Quand le vaisseau est sur le point d’exploser, on sacrifie notre puissance de feu pour renforcer notre bouclier. Si cela a l’air assez compliqué, ce n’est finalement pas très subtile et comme le système de score opaque et la profusion d’ennemis empêchent de monter une stratégie sérieuse, la profondeur de Cygni est toute relative. Pour autant, le dilemme entre bouclier et puissance de feu donne l’impression d’avoir été sous-exploité. Idem pour les frappes au sol sensées nous permettre de supporter notre armée pour qu’elle nous rende la pareille. Dommage car il y avait clairement matière à creuser cette facette du gameplay.  

Autre singularité qui agacera les amateurs du run parfait, il m’a semblé impossible d’éliminer tous les ennemis à l’écran. Même en connaissant les niveaux, chaque partie est différente, la faute à des patterns aléatoires, ce qui fera s’arracher les cheveux aux puristes. Et comme les ennemis viennent absolument de tous les côtés, on se sent souvent floué quand on prend une balle perdue dans le dos. Certains vaisseaux n’hésitent pas à nous tirer dessus en dehors de l’écran, ce qui est pourtant l’une des règles d’or de gamedesign à ne pas reproduire. D’autres viennent carrément du bas de l’écran… Quelle indignité !

J’aime l’odeur du napalm le matin...

Je t’aime. Moi non plus…

Néanmoins et malgré toutes ces approximations, survoler la campagne en une petite dizaine d’heures comporte quelques séquences mémorables. Deux niveaux spécifiques sont particulièrement originaux : le troisième avec une course effrénée à contre-sens sur une autoroute et cascade digne de F-Zero et le sixième qui est portée par une soundtrack atmosphérique inattendue. Les boss eux-aussi sont toujours bien amenés même si on est loin des patterns à maîtriser du bout des doigts d’un jeu culte comme DoDonPachi (lire notre critique).

Le troisième niveau commence à la verticale sur une cascade et autoroute à contre-sens... rien que ça !

En fait Cygni arbore une difficulté de façade. Contrairement aux jeux de Cave, le titre de KeelWorks ne procure pas la satisfaction ni la décharge d’adrénaline de celui qui a surmonté l’impossible. C’est finalement dommage que Cygni ait préféré des niveaux à rallonge plutôt que des runs courtes mais autrement plus intenses. Le jeu aurait gagné en profondeur là où certaines séquences flirtent le remplissage gratuit et inutile tout en pénalisant le rythme du jeu. Plus c’est long, plus c’est bon : une erreur de débutant malheureusement ! On recommandera aussi de changer la touche du lancer de missiles, placé par défaut sur le stick droit : un choix pas très fûté quand on sait combien il est facile d’appuyer par inadvertance sur ce bouton dans le feu de l’action !   

Très loin d’être mauvais, Cygni produit une curieuse impression une fois le générique atteint. Autant d’idées nouvelles survolées laissent un goût amer dans la bouche, comme si les développeurs tenaient un filon qu’ils n’ont pas su exploiter pleinement. Pour autant, Cygni éclate les schmups sortis à ce jour en termes de mise en scène, quitte à sacrifier sa lisibilité. La stratégie de l’esbrouffe diront les Japonais ? N’allons pas jusque là car la campagne sait paradoxalement faire preuve de fantaisie lors de quelques séquences où les développeurs se sont lâchés. Les Écossais de KeelWorks ont peut-être été dépassés par leur propre ambition et auraient dû porter plus d’attention au fond plutôt qu’à la forme. Cygni est à prendre tel quel : un jeu spectacle sympathique malgré ses défauts. Reste un titre rafraichissant qui vient taper dans la fourmilière plutôt que de copier les ténors du genre. Une audace qu’on lui reconnaît volontiers et des erreurs pardonnables, qui plus est pour un premier jeu ! Qui sait si KeelWorks transformera l’essai pour leur prochaine production qu’on attend désormais avec curiosité.

Pour
  • Splendide visuellement
  • DA inspirée
  • Mise en scène percutante
  • Système de gameplay original
  • Boss sympathiques
  • Des explosions partout, tout le temps !
  • Tuto bienvenu
  • OST surprenante
  • Sound Design de qualité
  • Possibilité de reconfigurer les touches
  • Cinématiques jolies
Contre
  • Lisibilité sacrifiée
  • Mécaniques sous exploitées
  • Frustrant au début
  • Système de score trop en retrait
  • Histoire insignifiante
  • Vaisseau savonnette
  • Rythme inégal
  • Bestiaire limité
  • L'esquive perd de sa superbe avec le bouclier

Critique JV et ciné toujours prêt à mener des interviews lors de festivals ! Amateur de films de genre et de tout ce qui tend vers l'Etrange. N'hésitez pas à me contacter en consultant mon profil.

5 1 voter
Évaluation de l'article
S’abonner
Notifier de
guest
1 Commentaire
le plus ancien
le plus récent le plus populaire
Commentaires sur Inline
Voir tous vos commentaires
Ummagumma
3 mois

Je pense que le manque de lisibilité est rédhibitoire pour moi!

1
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x