Tricotage de destins croisés entre la ligne séparant le sud du Liban et Haïfa en Israël, Tel Aviv – Beyrouth nous emmène dans les affres d’une guerre sans fin, entre 1984 et aujourd’hui.

La guerre au féminin

Le point de vue sur la guerre réside généralement dans l’œil de celui que l’on envoie au front. Tel Aviv – Beyrouth de la réalisatrice Michale Boganim retourne ce poncif en centrant son histoire sur deux noyaux familiaux, de part et d’autre de la ligne de démarcation entre les deux pays. Côté Israël, Myriam et Yossi, un couple dont la naissance du premier enfant est troublée par le quotidien militaire du mari. Côté libanais, Fouad et Nour, dont la réputation est mise à mal car Fouad est un Tsadal : il collabore avec l’armée israélienne pour combattre le Hezbollah. Plusieurs drames vont à jamais nouer le sort de ces deux familles…

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Réalisatrice de documentaires et de fictions, Michale Boganim offre dans Tel Aviv – Beyrouth un regard neuf sur le sempiternel conflit ainsi qu’une nouvelle manière de mettre en scène la guerre, majoritairement en hors-champ et au travers d’un regard féminin. Cette focale mise sur la petite histoire bouleversée par la grande est sans doute ce que Tel Aviv – Beyrouth a de plus intéressant à nous raconter, rappelant, toutes proportions gardées, ce que le film Les Harkis nous proposait au cinéma il y a quelques mois.

Tel Aviv déroute ?

Malheureusement, force est de constater que la mise en scène peine à rester à hauteur de son propos. Ni effacée (nous parlions pour Fièvre méditerranéenne d’une mise en scène toujours laissée au second plan de ses dialogues pour ne pas en parasiter la nature), ni vraiment inspirée, elle finit par perdre son sujet dans ses panotages constants et fatiguant et une lumière parfois trop factice. De même, certaines scènes souffrent d’un montage anarchique et de coupes trop fréquentes qui ne leur laissent jamais réellement le temps de prendre vie.

Pourtant, Boganim ne manque pas d’idées. Un travail visuel a été réalisé pour qu’au fil des ans (le long-métrage se déroule en 1984, 2000 et 2006) on parvienne à retrouver les personnages et à les suivre dans leurs évolutions. De la même manière, un discret code couleur permet d’identifier de quel côté de la frontière se trouve la caméra. Des indications visuelles subtiles mais qui permettent au spectateur, parachuté dans un récit où la réalisatrice prend le parti de ne donner aucune base théorique (par exemple sur les relations entre le Liban et Israël), de peu à peu reconstruire la grande histoire à partir de celle de ses personnages.

Points positifs

Des personnages d’ailleurs plus ou moins bien incarnés – une partie du casting peine à convaincre – alternant, et c’est l’une des bonnes idées du film, entre l’arabe, l’hébreu et le français. Autre point fort ? La musique ! Exit violons, piano et soulignement du pathos au Stabilo Boss musical, Avishai Cohen et la réalisatrice prennent le parti d’une musique inattendue, parfois déstabilisante mais insufflant une âme à l’image de la scène. Un travail d’orfèvre et une bande originale passionnante, à écouter même en dehors du long-métrage.

En somme, Tel Aviv – Beyrouth est une œuvre bancale. Passionnante par son propos, mais parfois mal servie par sa mise en scène et sa longueur trop étirée. Mais un long-métrage qui a le grand mérite de narrer une histoire qu’on ne connait que trop peu, et dont le cinéma s’est peu (ou pas ?) emparé : celle de ces soldats libanais, à l’existence chamboulée par une frontière infranchissable.

Fiche technique

DVD Zone B (France)
Éditeur : Blaq Out
Durée : 116 min
Date de sortie : 06 juin 2023

Format vidéo : 576p/25 – 2.39
Bande-son : Hébreu et Arabe Dolby Digital 5.1 (et 2.0)
Sous-titres : Français

Tel Aviv - Beyrouth

Buvant les Stephen King comme la sirupeuse abricotine de mon pays natal, j’ai d’abord découvert le cinéma via ses (souvent mauvaises) adaptations. Épris de Mrs. Wilkes autant que d’un syndrome de Stockholm persistant, je m’ouvre peu à peu aux films de vidéoclub et aux poisseuses séries B. Aujourd’hui, j’erre entre mes cinémas préférés, les festivals de films et les bordures de lacs helvétiques bien moins calmes qu’ils en ont l’air.

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KillerSe7ven
Administrateur
1 année

Toujours chouette de te lire. Dommage pour celui-ci, sur le papier c’était intéressant !

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