Féru de combats aux sabres comme dans son Ninja Scroll, d’histoires d’immortels aux sombres états d’âme à l’image de Vampire Hunter D, grand illustrateur et esthète de la violence comme il a pu le démontrer avec Wicked City, Yoshiaki Kawajiri semble être l’homme de la situation lorsqu’est décidé l’adaptation japanimée de la franchise Highlander.
Une saga globalement médiocre...
Depuis le premier (et de loin meilleur) volet de la saga réalisé par Russel Mulcahy en 1986 et son succès inattendu, les aventures du clan MacLeod avaient engendré une saga constituée de cinq films et d’une série télévisée, de qualité globalement médiocre. Cette fois-ci, nous sommes sur une coproduction américano-japonaise, au sein de laquelle s’est immiscé un intermédiaire chinois.
C’est donc l’américain Kevin Eastman (scénariste de la licence Les Tortue Ninja, entre autres activités) qui supervise le projet pour la firme Davis-Panzer Productions. Après avoir chargé David Abramovitz (déjà scénariste de la série TV Highlander de 1993 ainsi que de plusieurs autres comme MacGyver, V, Les dessous de Palm Beach, etc.) de concevoir une histoire reprenant l’univers de la licence, le studio hongkongais Imagi Animation convie le célèbre et cultissime studio nippon Madhouse (fondé par les maîtres Rintarô, Osamu Dezaki et Yoshiaki Kawajiri) à en assurer la réalisation et la production de l’animation. C’est donc Yoshiaki Kawajiri (dessinateur qui, au départ, n’a jamais voulu être réalisateur mais y fut poussé par ses collaborateurs de chez Madhouse) qui assure la conception du volet animé des aventures de l’immortel écossais.
Avec son style et ses références très ancrées dans les années 80 et 90, nul doute que le film Highlander, premier du nom, ait fait forte impression sur notre artiste tant il est proche de ce qu’il a l’habitude de proposer en matière de récit, d’ambiance et de traitement de la couleur (ses teintes bleutées et rougeâtres, si chères à Kawajiri depuis Wicked City, sont aussi des couleurs souvent utilisées dans le film de Mulcahy).
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L’histoire concoctée par Abramovitz nous amène en 2187, dans un futur post-apocalyptique où la ville de New-York, ou du moins ce qu’il en reste, est administrée d’une main de fer par Marcus, immortel n’étant autre que Marcus Octavius, général romain ayant tué la femme de Colin McLeod en -125 avant J-C. Ce dernier, membre du clan MacLeod à l’instar de Connor, Duncan et toute la fine équipe, avait lui aussi été laissé pour mort par le centurion maléfique.
Retrouvant la trace de l’assassin dans l’Amérique déchue et dévastée du XXIIe siècle, Colin entreprend alors de s’introduire dans la cité de New-York, devenue une véritable place gardée, afin de se venger. Néanmoins, la route sera longue et les rencontres et épreuves nombreuses avant que notre immortel puisse se retrouvez face à son ennemi si longuement recherché.
Abramovitz et Kawajiri ont décidé que ça allait castagner...
Il faut de suite en convenir, c’est essentiellement au niveau scénaristique que le bât blesse. L’intrigue est certes cohérente et facilement suivable. Néanmoins, tout est un peu trop convenu et peu de choses viennent réellement nous surprendre. L’utilisation de flashbacks, nous faisant passer par divers endroits et époques, sans être révolutionnaires par rapport à la licence Highlander, est assez agréable et vient rehausser une approche somme toute très simpliste de la narration (gentil chercher méchant – gentil trouver méchant – gentil tuer méchant).
D’ailleurs, en ce qui concerne « l’esprit Highlander », la mythologie de la saga est assez bien respectée. On entend même le fameux « il ne peut en rester qu’un » au détour d’un affrontement et on retrace les origines écossaises et guerrières du nouveau MacLeod. Les flashbacks, passant rapidement en revue la Rome et l’Écosse antique, le Japon médiéval, la Première et la Seconde Guerre Mondiale et un futur ravagé par les outrances humaines, font vite penser qu’une réflexion sur la permanence des pouvoirs politiques dictatoriaux, dont le personnage de Marcus est l’allégorie, aurait pu être possible et donner ainsi un peu de fond à cette trame bien légère. Mais il n’en est rien.
L’utilisation de mutants au début du film aurait aussi gagné à être davantage élaborée au lieu d’être purement et simplement abandonnée. De même, la sous-intrigue impliquant une armée de résistant luttant contre le pouvoir despotique de Marcus et l’asservissement du peuple par la peur d’un virus mortel est, à défaut d’être originale, intéressante. Cependant, tout ceci est avant tout utilisé pour concevoir quelques ficelles scénaristiques facilitant la rencontre avec le boss final; mais aussi pour mettre en place une semi amourette entre Colin et une jolie prostituée. Finalement, complexifier ou approfondir le propos n’est tout bonnement pas l’objectif: Abramovitz et Kawajiri ont décidé que ça allait castagner, un point c’est tout. Acceptons-le donc et ne gâchons pas notre plaisir.
Un imaginaire post-apo ne sortant jamais des sentiers battus...
Sans aucun doute, Kawajiri, qui n’est pas au scénario, ne fait jamais vraiment dans la finesse, étant davantage intéressé par le rendu graphique et animatique de ses projets. Seulement, on est ici vraiment au raz des pâquerettes. On comprend vite que le but est uniquement de tisser une trame cohérente faisant le lien entre des moments de bravoure ou/et de grâce techniques et visuelles.
Les influences du scénario sont assez évidentes: on est dans le post-apo le plus traditionnel et sont ainsi convoqués des références incontournables telles que Mad Max ou New York 1997. Et si les références sont les meilleures, leur utilisation, en revanche, l’est un peu moins. Highlander: Soif de vengeance date de 2007 et les films mentionnés sont des fleurons des années 80. Il faut avouer que peu de choses nouvelles viennent agrémenter un imaginaire post-apo ne sortant jamais des sentiers battus. Ces influences sont convoquées afin de servir de ciment conceptuel à l’intrigue de la manière la plus simple qui soit; ce qui donne un aspect un peu suranné à la chose tant le film est marqué par une ambiance et un ton propre à une décennie bel et bien révolue.
Au niveau de l’univers et des décors déployés, on distingue nettement une très forte influence du Hokuto no Ken de Tetsuo Hara, ne serait-ce que par la similitude des deux mondes post-apocalyptiques présentés: de vastes métropoles en ruines, cernées par des espaces désertiques et arides, dominées par des roitelets sanguinaires, au sein desquelles une population affaiblie tente de survivre au manque et à l’arbitraire.
Nous sommes bien chez Kawajiri !..
Coté réalisation, on retrouve ici tous les tropes du travail kawajirien, tant en ce qui concerne le chara-design que l’animation: des femmes très sexuées mais non dénuées de fougue, un héros badass mais tourmenté, des mentons carrés, de longues jambes, du sexe (bien plus sage que dans ses réalisations nippones), de la violence, des combats à l’animation fluide et des décors détaillés… Nous sommes bien chez Kawajiri !
Au niveau technique, Highlander représente tout de même le haut du panier de l’animation nippone. Yoshiaki Kawajiri et son animateur Takuji Endo (X, Patlabor 3, Paranoia Agent…) opèrent un boulot de très grande qualité. On atteint certes pas la maestria et la précision que l’on trouve dans d’autres œuvres du sensei, telles que Ninja Scroll ou Vampire Hunter D (dans lesquels l’animateur en chef n’est autre que le grand Takeshi Koike), mais le résultat est plus qu’honorable et, en tout cas, jamais décevant.
Si vous aimez les séries B à gros budget bien bourrines...
Cet anime est donc un projet sans grande ambition autre que technique. Si la réussite très graphique est assurée par des chara-design appliqués et une animation fluide et assez nerveuse, le film ne propose pas grand chose de nouveau si on le compare aux autres réalisation du Maître. En gros, c’est très bien fait… mais bien peu inventif.
En revanche, si, comme votre serviteur, vous aimez les séries B à gros budget bien bourrines, pas trop compliquées à suivre, et superbement exécutées; alors Highlander: Soif de vengeance, œuvre mineure mais recommandable du grand Kawajiri, vous fera passer un excellent moment.
En grand écart comme Jean-Claude entre l'Asie et l'Amérique, j'aime autant me balader sur les hauteurs du Mont Wu-Tang que dans un saloon du Nevada, en faisant la plupart du temps un détour dans les ruelles sombres d'un Tokyo futuriste.
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