Le réalisateur et acteur Fred De Loof était présent au BRIFF pour présenter son premier long-métrage, Totem. Une première prometteuse avec une salle pleine à craquer, qui rappelle combien Fred De Loof est en pleine ascension dans le pays de la fricadelle. Coutumier des projets déjantés, le réalisateur a fait ses armes dans des courts-métrages décomplexés comme Caca Boudin ou Les pigeons, ça ch** partout. Totem s’inscrit dans cette veine fécale à l’humour fécond. Une avant-première qui a fait mouche auprès du public belge, particulièrement réceptif aux comédies libérées des tabous. En parallèle, Fred présentait aussi en plein air sa nouvelle série Baraki, dont nous avons pu apercevoir les premiers épisodes. Et comme on ne manque pas de générosité, quand il s’agit d’humour noir et de comédie sociale, on a également pu échanger sans filtre avec Fred De Loof.

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Friture – Connecting People

Fred De Loof est un réalisateur qui endosse avec plaisir la casquette d’acteur déjanté. Toujours prêt à incarner des rôles bien trempés, Fred n’a pas peur de porter le mulet ! « Vu qu’il est belge, il boit de la bière, mange des frites et du chocolat mais pas tout en même temps » comme il le dit sur son site internet dédié à son travail ! Une tentative d’auto-définition de soi même qui colle parfaitement au personnage qu’on a rencontré au BRIFF ! 

Totem – Vous les copains je ne vous oublierai jamais…

Totem raconte les aventures de la patrouille des loups dont l’un des leurs a disparu. Vingt ans plus tard, Fred est traumatisé et continue de voir des rats géants le hanter la nuit. Une thérapie de groupe s’engage sur les lieux de leur dernier camp. Le synopsis du film précise que -je cite- « tout va partir en cacahuètes quand, au fond de leurs toilettes, il vont découvrir un passage temporel ». Le trou de ver est aussitôt l’occasion de délires sur la théorie du chaos et les paradoxes spatio-temporels, qui découlent, comme chacun sait, des risques du métier de sauter dans une fausse à purin. Pour ceux qui ne manquent jamais l’occasion de rigoler aux blagues pipi-caca, Totem réussit à séduire par son approche complètement barrée. « On a toujours fait des conneries et on rêverait tous de pouvoir remonter dans le temps pour [les]  pouvoir changer », voici l’idée de départ qui a fait germer le projet Totem comme l’expliquait Fred De Loof au public lors de l’avant-première bruxelloise !  

Totem
Porter le mulet en costume de boyscout, pas de soucis pour Fred De Loof !

« Le caca est une métaphore de la vie, on vit des choses qui sont belles à l'image de la nourriture qu'on ingère et au final on meurt et on pourrit. Il ne reste plus rien... comme de la merde ! »

Sous ces airs de Stranger Things parti en sucette dans un Multiverse où les super-héros seraient une bande de vieux scouts sans foi ni loi, Totem réussit à faire rire en parodiant aussi bien les codes des films d’horreur croisés à la survie forestière selon la tradition ramboiste. Porté par un rythme soutenu et une réalisation de qualité, Totem est un bon divertissement, qui ne tombe pas dans l’écueil de la lourdeur et sait bien doser son humour au bon moment. Un exploit et une belle surprise eu égard au pitch de départ ! Totem comme Baraki offrent aussi par le miroir du rire une réflexion sur l’affirmation de la personnalité et le harcèlement que promeut parfois la société.

Baraki - Le tuning, plus qu’un métier, une passion !

Un baraki qu’est-ce que c’est ? Lointain cousin du Jacky ou du plouc selon les uns, le baraki est un beauf qui s’ignore mais pas seulement… Cultivant par exemple un goût non dissimulé pour l’art automobile, la friture et l’honneur, il se distingue en outre par sa personnalité affirmée. Ne le traitez surtout pas de baraki sous peine de représailles et chez la famille baraki du film de De Loof, la vendetta est tout un art. Particulièrement portés par la surenchère, ces quatre premiers épisodes étaient l’occasion de faire connaissance avec une famille de Marsoux, en Wallonie. Cette sitcom est une comédie sociale sur la famille Berthet, bien connue comme un modèle du « barakisme ».

Baraki
Tuning et corbillard, une affaire qui roule !

« Les Baraki sont des gens qui vivent dans des baraques, des petites maisons qui étaient destinées aux mineurs venus d'Italie. Le terme baraki s'est étendu à toute la population qui est en général plus défavorisée financièrement et qui arbore un look un peu particulier. »

On y côtoie des personnages hauts en couleur : Yvan un jeune orphelin de quartier qui décide de rentrer dans la vie normale pour la femme de ses rêves, Didier un dealer égocentrique, bipolaire – et au coup de boule facile – accroc aux concours de décibels et bien décidé à écraser son rival Rayan Terrier, joué par Fred De Loof lui-même. Mention spéciale à l’arrivée de Fred De Loof avec les caissons de basses à plein régime pour impressionner son adversaire qui lui a cassé les dents pour s’être fait traiter de baraki !

On suit également bien d’autres huluberlus avec un casting en partie commun à celui de Totem. Le pilote de la série est très rythmé et promet des épisodes drôles et des personnages peut-être plus touchants qu’il n’y parait. Telle une caisse de résonance dans un coffre d’une Honda au concours de décibels de Marsoux, Baraki est une curiosité locale qui dresse un portrait amplifié de ces oubliés et aucunement pour se moquer. Le rire est sensible ici à la liberté de ton du baraki qui contrairement aux autres n’hésite pas à s’affranchir des codes pour réaliser ses rêves et accomplir son désir comme l’explique justement Fred De Loof :

« Ce qu'on trouve beau chez le baraki justement, c'est qu'il y a une liberté d'esprit. Il y a des mecs qui font une raclette dans une piscine avec des rallonges, qui refont une piscine dans un pickup... Ok, on a envie de vivre çà, on va y aller ! On va pas spécialement rentrer dans le moule que la société voudrait nous infliger »

Un bon départ pour ces quatre premiers épisodes. Affaire à suivre sur la durée comme toujours pour les séries ! Sorties prévues exclusivement en Belgique pour le moment ! On espère que Baraki comme Totem donneront lieu à une distribution française, car nul doute que ces comédies sociales puissent trouver un public en France. Le cinéma belge reste un exemple en matière de narration des histoires des petites gens et on souhaite que Baraki suive cette même voie à la croisée du rire et du sensible : un sillon tracé par La merditude des choses et bien d’autres encore.

Critique JV et ciné toujours prêt à mener des interviews lors de festivals ! Amateur de films de genre et de tout ce qui tend vers l'Etrange. N'hésitez pas à me contacter en consultant mon profil.

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