Après l’inabouti Mi iubita, mon amour, Noémie Merlant repasse derrière la caméra pour nous livrer une comédie teintée d’horreur déjà passée par la case Festival de Cannes : Les Femmes au balcon. Hilarant, puissamment féministe et ultra énergétique, voilà une très belle proposition de ce début de GIFF (Geneva International Film Festival) !

Coup de chaud

Élise (Noémie Merlant), Ruby  (Souheila Yacoub) et Nicole (Sanda Codreanu) sont trois potes habitant ensemble dans un appartement marseillais. Tandis qu’une chaleur étouffante écrase la cité phocéenne, elles profitent au maximum de leur balcon et ne tardent pas de remarquer un nouveau voisin (Lucas Bravo), qui a tendance à décidément bien peu s’habiller. Ce frisson voyeuriste va vite devenir concret lorsque le jeune homme les invite chez lui. Pourtant, tout va très vite déraper…

Quel plaisir de retrouver Noémie Merlant, après le (très attendu) Emmanuelle. Décevant, autant formellement que sur son fond, la nouvelle adaptation d’Audrey Diwan n’avait rien pour convaincre. Pour Les Femmes au balcon, Merlant revête un rôle moins central, mais (re)passe derrière la caméra pour son deuxième film en tant que réalisatrice après l’imparfait Mi Iubita, mon amour en 2021. Il s’agissait d’une sorte de Mektoub, my love en Roumanie qui – si le projet boitait – portait déjà en lui les germes de ce que sera Les Femmes au balcon : un cinéma solaire, féminin, féministe et parfaitement libre.

« Emmanuelle » (2024)

Films de canicules

Vous ne vous souvenez probablement pas de Te l’avevo detto, le génial film italien projeté l’année dernière au GIFF et qui n’est (très) malheureusement pas sorti en salles en France. Et pourtant, c’est la même ambiance d’été assommant qui a soufflé dans la salle du Théâtre Pitoëff lors de la projection du long-métrage de Noémie Merlant. L’impression, encore, d’assister à une nouvelle forme de cinéma, infusée des thématiques contemporaines, résolument moderne, ultra-inventive et libre.

Et de liberté il est question dans Les Femmes au balcon. En dressant le portrait de ces trois nanas (l’une actrice, l’autre camgirl, la troisième wannabe écrivaine), Merlant dessine les contours d’une nouvelle génération de femmes qui requiert, pour les représenter, une nouvelle manière de faire du cinéma. Celui-ci se tient à la lisière de plusieurs genres (comédie, horreur, drame), mais ne les embrasse pas chichement du bout des lèvres : Les Femmes au balcon y va franco ! Le film s’autorise la nudité frontale, de nombreuses thématiques sexuelles mais aussi (et surtout) des incursions bien crades dans le gore pour des segments aussi hilarants que dégoûtants.

Porté par un trio d’actrices simplement parfaites, la comédie n’est pourtant jamais superflue. Elle creuse – profondément – la question des violences sexuelles, sous plusieurs angles, et relate de l’intérieur les passions, les angoisses, les meurtrissures mais aussi les fantasmes et les pulsions du féminin. Multiplication des genres adaptée à une pluralité des messages, sans que cela ne devienne jamais ni plombant, ni fouillis. Et le film de se clore en un final aussi jouissif que surprenant : une relecture de La liberté guidant le peuple version féministe, certes libératrice, mais qui saura aussi et surtout faire rire et réfléchir. À ne surtout pas manquer en salles !

Buvant les Stephen King comme la sirupeuse abricotine de mon pays natal, j’ai d’abord découvert le cinéma via ses (souvent mauvaises) adaptations. Épris de Mrs. Wilkes autant que d’un syndrome de Stockholm persistant, je m’ouvre peu à peu aux films de vidéoclub et aux poisseuses séries B. Aujourd’hui, j’erre entre mes cinémas préférés, les festivals de films et les bordures de lacs helvétiques bien moins calmes qu’ils en ont l’air.

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